EMI a mis fin à ses poursuites et signé avec un accord avec la plateforme d’écoute de musique en ligne Playlist.com. Mais sous couvert de défendre la musique légale, l’accord renforce la position des majors au détriment des artistes indépendants.

On ignore le montant du chèque, dont on ne doute pas de l’existence. Le site Playlist.com (Project Playlist) annonce qu’il a signé un accord avec la maison de disques EMI, qui lui permet de diffuser en streaming la musique de la maison de disques britannique. L’accord vise à conforter dans sa position dominante un site qui affiche 42 millions d’utilisateurs enregistrés, contre lequel EMI avait d’abord porté plainte. Basé en Californie, le site est encore sous le coup de poursuites entamées par la RIAA et les majors du disque Universal et Warner. Sony Music avait été le premier à signer un accord avec Project Playlist en décembre 2008.

Pour favoriser le succès de Playlist.com en dirigeant un maximum d’utilisateurs vers le service pour multiplier son audience et ses revenus publicitaires, EMI poursuit en parallèle des applications concurrentes qui se trouvent dans une zone grise au niveau juridique. La maison de disques a ainsi poursuivi Seeqpod, un site qui permet aux utilisateurs de partager des playlists dont les fichiers MP3 sont hébergés ailleurs, sur des serveurs qui ne sont pas contrôlés par Seeqpod.

Légaliser pour mieux raréfier

EMI a même été jusqu’à attaquer en justice un développeur indépendant qui aurait selon EMI le tort d’utiliser l’API de Seeqpod pour son propre service de playlists. Plus tôt, en décembre, Facebook et MySpace avaient préféré interdire les applications de Playlist.com de crainte d’être eux-mêmes poursuivis pour un service qu’ils n’ont pas créé et ne contrôlent pas.

En France, la stratégie d’élimination des offres illégales ou en zone grise existe également, avec le soutien affiché du gouvernement et de la majorité pour Deezer. Numerama a compté qu’en deux jours de débat à l’Assemblée Nationale, le mot « Deezer » a été prononcé à 27 reprises par la ministre de la Culture, le rapporteur Frank Riester et les députés. Une jolie publicité inscrite au Journal Officiel.

Si en soit le fait de lutter contre les sites illégaux n’est évidemment pas condamnable, le fait de chercher à réduire le nombre d’acteurs dans le but de multiplier leur audience pour garantir leur viabilité est extrêmement dommageable. En premier lieu pour les artistes eux-mêmes, qui n’auront pas d’autre choix que de signer des contrats très coûteux avec les maisons de disques ou des aggrégateurs de musique indépendante pour avoir une chance d’être diffusé sur ces plateformes. Lesquelles sont rémunérées par les labels les plus puissants pour mettre en avant leur musique au détriment des labels ou artistes indépendants.

A l’heure où nous écrivons ces lignes, la page d’accueil de Playlist.com met en avant l’artiste Bow Wow… signé chez Sony Music.

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