Bruno Ory-Lavollée est l’ancien directeur de la Société pour l’administration des droits des artistes et musiciens interprètes (Adami), qui défend les droits des artistes-interprètes de premier plan. Dans une tribune au titre étonamment discret (« Création et Internet » : inutile précaution ?« ), l’ancien directeur de l’Adami – qui avait défendu la licence globale en 2005 – attaque vertement dans le journal Le Monde le projet de loi Création et Internet.
Partant du constat que le dispositif de la riposte graduée envisagé par la loi Création et Internet « ne pourra jamais régler qu’une partie du problème, celle qui se situe sur les réseaux de pair à pair« , Bruno Ory-Lavollée s’inquiète des dérives auxquelles pourra aboutir l’Hadopi si elle décidait de chasser également le piratage sur les serveurs Usenet (newsgroups), les services de stockage déportés, les captations de streaming ou l’envoi de fichiers par e-mail.
« Pour traquer de tels téléchargements, il n’y a pas de voie publique où relever les numéros : il faut intercepter les flux de données arrivant chez l’internaute et les analyser pour y repérer les contenus protégés. Autrement dit, pour les usages autres que le pair à pair, il faut un dispositif – technologies, équipements, organisation – qui s’apparente à des écoutes téléphoniques, et qui accumulera une connaissance détaillée des consommations culturelles de millions d’individus« , explique M. Ory-Lavollée.
« Certes, à la différence de l’inoubliable film La Vie des autres, on sait faire ce travail avec des robots, mais Staline aurait adoré« .
« Si le droit d’auteur est un droit de l’homme, cela ne doit pas avoir pour prix une société policière« , prévient-il, en s’adressant à la conscience des artistes qui ont (ou auraient) signé des pétitions pour soutenir la loi Création et Internet. « Aucun des artistes qui ont signé des pétitions pour soutenir cette loi ne peut accepter qu’en son nom on s’attaque aux libertés individuelles, ni que la culture, synonyme de liberté et d’épanouissement, entre en ménage avec l’espionnage des vies privées« , estime M. Ory-Lavollée.
Il estime que si le téléchargement illégal baisse grâce à l’Hadopi, ça ne durera qu’un temps. « Il migrera des grands bazars gratuits du peer to peer vers des foires au troc locales, prenant souvent la forme de communications privées. Dès lors, la question d’indemniser les créateurs, les interprètes et les producteurs au titre des œuvres téléchargées illégalement reste entière« .
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