Comme prévu, c’est ce jeudi que le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand a confié à Patrick Zelnick la présidence de la mission « Création et Internet », deux ans après les accords de l’Elysée du 23 novembre 2007 qui avaient abouti au projet de loi Hadopi. Le successeur de Christine Albanel a demandé au producteur, président du label Naïve et du lobby européen Impala, de lui remettre avant le 15 novembre des propositions de mesures concrètes et rapides « qui seront ensuite présentées au Président de la République et au Premier ministre, et dont la mise en œuvre pourrait être engagée avant la fin de l’année« .
Le conflit d’intérêt, flagrant, ne semble pas gêner le moins du monde le ministre de la Culture, qui a salué les « personnalités éminentes » à qui est confiée la mission. Outre Patrick Zelnick, qui aura bien du mal à entendre les revendications des auteurs contre les producteurs, la mission est composée de l’ancien ministre de la Culture Jacques Toubon, opposant farouche à l’amendement Bono et à la neutralité du net.
Le rapport devra selon les souhaits de M. Mitterrand s’articuler en deux axes : favoriser l’attractivité de l’offre légale, et faciliter la circulations des œuvres et de leurs droits. En clair, combler les failles de la mission Olivennes qui s’était concentrée sur le bâton en délaissant complètement la carotte. « Le débat a été un peu réducteur jusqu’à présent et il a pris plutôt l’allure d’une espèce de guerre de tranchées (…) On veut essayer de sortir de la tranchée« , a commenté l’ancien ministre.
Mais Frédéric Mitterrand a déjà rajouté de l’huile sur le feu, en s’en prenant aux « absolutistes de l’internet libre » qui ont combattu la riposte graduée avec des « controverses déraisonnables« . Tellement déraisonnables qu’elles ont été confirmées par les sages du Conseil constitutionnel, qui avaient jugé le projet de loi de Christine Albanel contraire à la liberté d’expression et à la présomption d’innocence, entre autres.
Quant à Patrick Zelnick, il a déjà le réflexe habituel du producteur : demander des lois. « Il s’agira de mesures réglementaires, voire législatives« , prévient déjà sur Le Point le lobbyiste. « Il n’est pas exclu que nous allions vers une « loi Hadopi 3« . « L’Europe, aussi bien la Commission que le Parlement, y sera associée. Nous allons beaucoup consulter. Tous les pays y réfléchissent et il est urgent d’avancer, compte tenu des dégâts constatés dans certains secteurs, et je pense notamment à la musique. C’est un enjeu mondial. Les Américains sont confrontés aux mêmes problèmes que nous et ont les yeux braqués sur nous. On aura l’appui du monde entier.«
Prenons le pari que parmi les propositions de la mission Zelnick figurera d’une part la taxation des FAI, et d’autre part le filtrage de « sites illégaux » référencés par l’Hadopi. Jacques Toubon, chargé au sein de la commission de « l’adaptation du droit d’auteur et des droits voisins à l’univers numérique« , est un fervant partisan de ce type de mesure, tout comme la quasi totalité de l’industrie culturelle.
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