Dans un entretien donné aujourd’hui à l’Express, Patrick Zelnik est revenu sur le principe de la licence collective qui est censée faciliter l’accès aux catalogues des maisons de disque pour les services de musique en ligne (comme Deezer, Jiwa ou Spotify). Vraie surprise du rapport, l’idée a cependant rencontré une vive opposition de la plupart des ayants droit, SCPP et SNEP en tête.

En effet, cette proposition a pour principal objectif d’éviter que les différents services musicaux engagent systématiquement de lourdes (et coûteuses) négociations avec les labels. Ainsi, en établissant un régime finalement assez proche de ce qui existe déjà pour les radios hertziennes (elles ont accès légalement à un large contenu musical contre le paiement d’une rémunération équitable), le gouvernement espère ramener sur le chemin de la légalité de nombreux internautes.

Or, pour les maisons de disque, cette licence collective semble desservir leurs intérêts. La semaine dernière, Pascal Nègre avait, lors d’une conférence de presse organisée par la Société Civile des Producteurs Phonographiques (SCPP), estimé qu’on mettait « la charrue avant les boeufs« . Pour lui, il était essentiel de faire décoller d’abord le business de la musique en ligne, avant de parler « du partage du gâteau« , peu disposé à partager sa part de gâteau.

Le Syndicat National de l’Edition Phonographique (SNEP) a suivi le mouvement par la voix de directeur général, David El Sayegh : « On dit que la gestion collective va permettre une simplification de la gestion des droits, une meilleur répartition de la richesse et une plus grande diversité des offres: c’est faux » a-t-il déclaré à l’Expansion,estimant que cette question résulte avant tout d’une « erreur de diagnostic » et qu’il s’agit là « d’un point d’achoppement très fort« .

Il est vrai qu’avec un « quatrième trimestre qualifié de très bon » par le SNEP lui-même, il n’est pas question de voir arriver une quelconque licence de gestion collective, même si le président de la République a repris l’idée à son compte. Surtout que l’embellie est manifestement à mettre au crédit du téléchargement légal, qui a connu une hausse de près de 50 % pour l’année 2009. Il faudra rester discret sur ces bonnes performances, sinon comment justifier l’arrivée de cet arsenal législatif anti-piratage ?

Or donc, alors que la proposition va mettre les maisons de disque devant leur responsabilité (faute d’accord, le rapport propose l’instauration de ladite licence par voie législative), voilà que Patrick Zelnik tient un discours bien loin de ce qu’on nous avait habitué. Tandis que Denis Olivennes considérait en son temps que le piratage était responsable de la destruction de la culture, le président du label Naïve a lancé que « la concentration dans l’industrie musicale a tué le disque« .

Selon lui, « ce n’est pas dû qu’au piratage mais aussi à la forte concentration du marché avec quatre majors (Warner Music, Emi, Universal Music, Sony) et peut-être bientôt trois. Cette concentration créée une popérisation de l’offre« .

Inattendu de la part d’un patron de label. Cela fait désormais plusieurs années que les ayants droit et les différents gouvernements sensibles à leur cris d’orfraie rabâchent à longueur de discours que le piratage est responsable de tous les maux de l’industrie culturelle. Se pourrait-il que d’autres facteurs soient responsables des difficultés que rencontrent les ayants droit ? Comme la concentration dans ce milieu ou leur frilosité à se lancer pleinement dans l’ère du numérique ?

Le discours n’est d’ailleurs pas nouveau :

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