Serait-ce le résultat de la réunion à huis clos entre les ayants droit et l’administration américaine ? Le procureur général des Etats-Unis, Eric Holder, a annoncé la création d’une force dédiée à la lutte contre les infractions au droit d’auteur et à la propriété intellectuelle. Celle-ci, au sein du Département de la Justice américaine, est pourtant troublante : en effet, elle est surtout constituée d’anciens membres de lobbys.

En décembre dernier, Joe Biden organisait une table ronde sur le piratage des contenus protégés par le droit d’auteur. Bien qu’ayant affirmé à l’époque que cette réunion se ferait « avec toutes les parties prenantes« , le vice-président avait en réalité surtout profité de ce prétexte pour réunir les représentants des différentes industries du divertissement, les employés de la haute administration et les membres de la sécurité nationale.

En effet, ni les sociétés de l’univers high-tech, ni les fournisseurs d’accès à Internet, ni même les associations de défense des consommateurs ne furent conviés à cette table ronde. À la place, il y a en revanche eu tout un aréopage de représentants de l’industrie du divertissement : citons au hasard Sony Pictures, Warner Bros, NBC Universal, Warner Music, Universal Music, la MPAA, la RIAA, sans oublier les officiels américains : le procureur général des États-Unis, le secrétaire au commerce, la secrétaire à la Sécurité intérieure , le directeur du FBI et le chef des Services secrets.

°videmment, la réunion s’est déroulée à huis clos, sans le regard indiscret des journalistes et la présence nécessaire de parties adverses. À l’époque, rien n’avait filtré de cette table ronde, bien qu’il soit très facile d’imaginer quels ont été les propos échangés entre de hauts représentants américains et ces puissantes organisations privées. Pour un gouvernement qui promettait d’être une administration transparente, cette réunion entre des hauts représentants américains et de puissantes organisations privées ne va certainement pas apaiser les esprits. Et pourtant, Barack Obama en avait fait une promesse électorale.

Deux mois plus tard, on en sait un peu plus. Le procureur général des États-Unis, Eric Holder, a annoncé la création d’une force spéciale au sein du Département de la Justice. Surnommée « IP Task Force », celle-ci aura pour charge de contrer « la hausse des infractions à la propriété intellectuelle« . Dans la mesure où plusieurs représentants de la RIAA et de la MPAA ont été nommés par l’administration américaine, cela n’a rien de surprenant.

À l’heure actuelle, le Département de la Justice compte le principal avocat de la RIAA, Tom Perrelli, l’ex-avocat en chef de la Business Software Association (BSA), Neil MacBribe, et Donald Verrili, un ancien avocat issu du même cabinet que Tom Perreli. Ce dernier, nommé procureur adjoint, avait réussi à btenir de la Cour Suprême la jurisprudence Grokster qui rend dangereuse l’édition de logiciels de P2P aux États-Unis. C’est aussi lui qui s’est opposé – sans succès – à la révision du procès de Jammie Thomas, qui avait été condamnée à verser 220.000 dollars de dédommagement à la RIAA, pour 24 fichiers MP3 partagés sur Kazaa.

Ces différentes nominations, associées à des réunions à huis clos, ne laissent pas présager d’un avenir radieux pour les défenseurs d’une réforme du droit d’auteur. En effet, maintenant que plusieurs représentants de l’industrie culturelle ont été placés dans le Département de la Justice, il est impensable de croire que ces derniers ne vont pas freiner des quatre fers en cas de tentative de réforme.

En anticipant un peu, on peut même imaginer qu’ils soutiendront toute proposition visant à durcir les sanctions ou renforcer encore un peu plus les droits d’auteur. Tout ça pour protéger des entreprises dont le modèle économique n’est tout simplement plus adapté à l’ère numérique.

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