C’est Vincent Glad qui soulève le lièvre sur Slate. Au mois de mars dernier, l’ancien rapporteur de la loi DADVSI Christian Vanneste, reconverti en féroce opposant à la loi Hadopi, avait écrit au gouvernement pour lui demander de réagir à la publication de l’étude du laboratoire de recherche M@rsoin sur l’impact de la loi Hadopi sur le piratage. Elle concluait que les pratiques de P2P avaient diminué suite à l’adoption de la loi sur la riposte graduée, mais au profit de techniques alternatives de téléchargement. Au global, le solde était positif… pour le piratage, avec une augmentation de 3 % du nombre des pirates déclarés.
Nous avions nous-mêmes mis en doute les résultats de l’étude, en disant que « tout le problème de ce genre d’étude est de savoir si la personne qui répond aux questions par téléphone le fait de manière totalement libérée, ou en ayant peur de dévoiler ses pratiques illicites à un inconnu, même s’il lui promet l’anonymat« .
Or dans sa réponse publiée au Journal Officiel le 1er juin, le ministère de la Culture pioche dans l’étude les résultats qui l’arrangent le mieux. Ainsi, la rue de Valois se réjouit de lire que l’étude « met à jour un résultat positif puisque 15 % des internautes qui utilisaient les réseaux de pair à pair déclarent avoir cessé de télécharger sur ces réseaux« .
Mais elle oublie de mentionner que « les deux tiers (de ces 15 %, ndlr) se sont tournés vers des pratiques alternatives de piratage échappant à la loi Hadopi comme le streaming illégal (Allostreaming…) ou le téléchargement sur des sites d’hébergements de fichiers (Megaupload, Rapidshare) » (page 11 de l’étude), et que « la réduction du nombre d’internautes qui utilisent les réseaux peer-to-peer s’est donc accompagnée d’une hausse des autres formes de piratage non prises en compte par la loi Hadopi (+27%) » (même page).
En revanche, elle n’oublie pas de signaler « l’augmentation de 3 % du nombre de pirates« , mais simplement pour dire que le résultat « n’apparaît pas comme un chiffre représentatif sur le plan statistique , de l’avis même de l’un des auteurs de l’étude, puisqu’il est calculé à partir d’une sous-partie de l’échantillon ne représentant que 6 personnes« .
Ce qui était statistiquement valide pour les 15 % ne l’est donc plus pour les 3 %. Ce qui serait peut-être vrai… si ça n’était pas complètement faux.
En fait, lorsque le ministère parle de 6 personnes comme pour faire croire qu’il parle de l’échantillon étudié, il parle d’un différentiel. L’étude partait d’un échantillon de 2000 personnes contactées par téléphone en Bretagne, dont 1340 étaient des internautes, et 750 étaient des « consommateurs de vidéo et/ou de musique en ligne ». Sur cet échantillon restant, 221 personnes déclaraient pirater avant l’Hadopi, et 227 déclaraient pirater après l’Hadopi. D’où les « 6 personnes ».
Les 15 % d’utilisateurs des réseaux P2P qui déclarent avoir cessé représentent 15 personnes.
Sur ces 15 personnes, 5 internautes ont renoncé à toute forme de piratage. Est-ce plus représentatif sur le plan statistique que le différentiel de 6 personnes dénigré par la rue de Valois ?
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