Dans sa décision, le Conseil d’Etat a estimé qu’il n’y avait « aucun doute sérieux sur la légalité du décret » attaqué par la FDN, qui demandait la suspension de la mise en oeuvre de l’Hadopi. Tous ses arguments ont été rejetés, aussi bien sur le vice de procédure que sur les atteintes aux droits fondamentaux. Un jugement au fond devrait venir confirmer et préciser les motivations du rejet.

Comme nous l’indiquions ce mercredi matin, le Conseil d’Etat a rejeté la demande de suspension de l’exécution de la riposte graduée, qu’avait présentée le fournisseur d’accès associatif FDN. Turblog publie l’ordonnance de rejet, qui laisse très peu d’espoirs sur le succès de la procédure au fond.

Le Conseil d’Etat estime en effet qu’il n’y a pas de « doute sérieux sur la légalité » du décret attaqué, que ce soit sur le respect du principe du contradictoire, le vice de procédure, ou « les autres moyens invoqués, tirés de l’atteinte que ce décret porterait à la présomption d’innocence, à d’autres libertés fondamentales ou droits garantis par la Constitution« .

Sauf très improbable retournement de situation, le jugement au fond ne devrait pas contredire les juges du référé, qui estiment « qu’aucun des moyens invoqués par l’association requérante n’est de nature à faire naître, en l’état de l’instruction, un doute sérieux sur la légalité du décret dont elle demande la suspension« . Il est évidemment frustrant de ne pas avoir plus d’arguments, ce qui empêche toute contre-argumentation, mais ce sera là le rôle de la décision au fond.

Pour relire les motifs du recours déposé par FDN, voir notre article du 8 septembre 2010, et celui du 9 septembre 2010 qui s’intéressait plus particulièrement aux problématiques de respect des droits fondamentaux.

L’ordonnance de rejet :

Considérant qu’eu égard à la nature et à la porté de la recommandation prévue par l’article L. 331-26 du code de la propriété intellectuelle, le moyen tiré de ce que le décret contesté aurait dû prévoir que l’envoi par la commission des droits de la haute autorité de la première recommandation prévue par cet article serait précédée d’une procédure contradictoire n’est pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de ce décret.

Que ce décret n’ayant pas été pris pour l’application du décret 2010-236 du 5 mars 2010 relatif au traitement automatisé de données à caractère personnel autorisé par l’article L 321-29 du code de la propriété intellectuelle, le moyen tiré d’un vice de procédure dont ce dernier décret serait, selon l’association requérante, entaché, n’est, en tout état de cause, pas davantage de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité du décret contesté

Que les autres moyens invoqués, tirés de l’atteinte que ce décret porterait à la présomption d’innocence, à d’autres libertés fondamentales ou droits garantis par la Constitution, ne sont pas non plus de nature à créer un tel doute.

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’aucun des moyens invoqués par l’association requérante n’est de nature à faire naître, en l’état de l’instruction, un doute sérieux sur la légalité du décret dont elle demande la suspension ; que, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’urgence, la requête à fin de suspension de ce décret ne peut, en conséquence, qu’être rejetée.

Par ailleurs, PC Inpact énonce les différents arguments juridiques qui auraient été opposés par le gouvernement à la demande de FDN :

  1. La preuve de l’urgence n’est pas rapportée, il faut au contraire appliquer au plus vite le décret litigieux compte tenu de l’hémorragie du piratage.
  2. Le décret sur la procédure ne souffre d’aucun bug de légalité : la procédure d’envoi des recommandations est légale, même s’il elle ne respecte pas à la lettre le principe du contradictoire au titre de la motivation des actes administratifs, loi du 11 juillet 1979 /la loi du 12 avril 2000).
  3. Le décret de juillet n’est pas une mesure d’application du décret de mars. En ce sens, le décret de mars s’appuie sur l’article L.331-29 du code de la propriété intellectuelle, celui de juillet sur l’article L.331-30 (et non sur le décret de mars).
  4. La consultation de l’ARCEP ne s’étend pas aux questions liées à l’interconnexion des fichiers puisque cela n’orchestre modification de la régulation des réseaux exploités par les opérateurs.
  5. L’Arcep avait déjà été consultée en amont des débats Hadopi et elle avait pu alors émettre son avis.
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