Ceux qui imaginent encore que la communauté open-source n’est faite que d’amour et de partage se trompent lourdement. Il s’y joue souvent des querelles d’églises très virulentes, à l’image de celle qui oppose un contributeur important de VLC soutenu par la FSF au président de VideoLAN, à propos du portage du lecteur multimédia sur la plateforme iOS d’Apple.

Mise à jour : Alors qu’une version pour Android est en préparation, VLC a été retiré par Apple de l’App Store. Le développeur Rémi Denis-Courmont, qui avait protesté contre le portage du lecteur multimédia sous iOS, annonce la nouvelle sur le blog de Videolan, où il assure ne pas connaître les raisons exactes du retrait, et ne veut pas en assumer la responsabilité. C’est pourtant bien lui qui avait demandé le retrait de l’application à Apple, et qui dit aujourd’hui qu’il peut s’agir d’une simple décision commerciale de la part de la firme de Cupertino. Laquelle selon lui « ne peut pas tolérer qu’il y ait des applications distribuées sous licence GPL sur ses boutiques« . Applidium, l’éditeur de la version iOS de VLC, devrait apporter des explications dans la journée.

Article du 2 novembre 2010 – De tous les logiciels de lecture de vidéos au monde, VLC est sans aucun doute le meilleur, au moins du point de vue de sa grande simplicité. Le logiciel open-source est capable de lire la plupart des vidéos sans que l’utilisateur ait besoin de se soucier de l’installation de codecs. Il sait à peu près tout lire, sur tous les systèmes d’exploitation où il est installé. C’est pourquoi son apparition récente sur l’App Store a immédiatement été couronnée de succès. Enfin l’on peut lire sur l’iPhone ou l’iPad n’importe quelle vidéo, DivX, XviD, OGV, Windows Media ou autre, sans aucune manipulation.

Le portage de VLC vers iOS a été réalisé gracieusement par la société Applidium, avec le blanc-seing de l’organisation parisienne VideoLAN qui encadre le développement de VLC, démarré à l’Ecole Centrale en 1996. L’application pour iPhone est distribuée gratuitement sur l’App Store, et son code source est disponible sur le site de VideoLAN. Le tout est gouverné par la licence GPLv2.

Mais l’initiative n’a pas plu à tout le monde, et surtout pas à Rémi Denis-Courmont, l’un des principaux contributeurs historiques du projet. L’homme, qui travaille aujourd’hui pour Nokia sur les noyaux Linux, a décidé la semaine dernière de porter réclamation auprès d’Apple en violation de droits d’auteur, parce qu’il estime que la publication d’une version de VLC sur l’App Store contredit la licence libre GPLv2. Selon lui les conditions contractuelles d’Apple imposent de nouvelles restrictions à l’utilisation du logiciel, qui ne sont pas compatibles avec le logiciel libre et sa licence originelle. Il invite les utilisateurs à se tourner vers des plateformes mobiles « plus ouvertes« .

Sa plainte a été relayée par la Fondation pour le Logiciel Libre (FSF), qui rappelle qu’elle avait été elle-même en conflit avec Apple il y a plusieurs mois suite à la publication sur l’App Store d’un portage du jeu GNU Go, finalement supprimée par la firme de Cupertino. « Apple a décidé qu’ils préféraient imposer des DRM et des conditions contractuelles propriétaires sur tous les programmes de l’App Store, et exclure les logiciels sous licence GPL plutôt que de changer leurs propres règles« , constate amèrement la FSF, qui soutient l’initiative de Rémi Denis-Courmont. « Les gens qui font respecter la GPL comme Rémi combattent les DRM, pour que chacun puisse avoir le contrôle entier de son propre ordinateur« , explique la FSF qui le remercie.

Mais c’est Jean-Baptiste Kempf en personne qui est intervenu lundi pour soutenir la démarche d’Applidium. Le Président de VideoLAN s’en prend à ceux qui « utilisent VLC pour défendre leurs propres opinions politiques (…) que ce soit Apple, Microsoft, Google ou la FSF« . Pour lui, « la liberté c’est de pouvoir ouvrir VLC à autant de plateformes que possible« . Pragmatique, il constate que même s’il n’aime pas cette évolution, « les AppStores vont devenir de plus en plus courants, avec le MacStore (10.7), le WinStore (Windows 8), sans parler d’iOS, Android, et Ovi« . « Ce seront les manières naturelles d’installer des applications, et si vous le pensez pas, vous devriez parler aux utilisateurs« , avance-t-il.

Mais Kempf n’est pas que pragmatique. C’est avec un costume de juriste amateur mais rigoureux qu’il a publié une longue démonstration de la probable compatibilité de la licence GPLv2 avec les conditions d’utilisation de l’App Store, dont il signale qu’elles ont changées depuis l’affaire GNU Go. Ainsi désormais, le contrat d’Apple n’impose plus aux applications d’être gouvernées sous ses propres règles, mais permettent aux développeurs d’attacher leurs propres conditions d’utilisations, qui remplacent celles d’Apple si elles sont « valides ». Il note que nulle part ailleurs le contrat de l’App Store n’impose de restrictions qui brideraient « la copie, la distribution et la modification » du logiciel, qui constituent les trois droits imposés par la licence GPLv2.

Pour le président de VideoLAN, toute la question est donc de savoir si la GPLv2 constitue des conditions d’utilisation « valides » au regard d’Apple. Il concède que c’est là une « zone grise », mais qu’il suffirait à Applidium d’attacher ses propres conditions d’utilisation qui ne soient pas incompatibles avec la GPLv2, pour éviter l’obstacle.

« Il faudrait noter que le code source et les binaires de VLC sur iOS sont sur le site Videolan.org, et que n’importe qui peut modifier et recompiler VLC pour iOS à n’importe quel moment, et le redistribuer, à travers le mode qu’il souhaite. Et c’est ça les droits importants de la GPLv2« , conclut-il.

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