« Mais pourquoi aime-t-on vraiment la musique ? ». On croyait que cette question pouvait être posée à des bacheliers littéraires, en réalité, c’est davantage aux épreuves du Bac S que les lycéens risquent de plancher sur ce problème…

Nous en parlions dans notre précédent article, « la diversité musicale s’efface devant le matraquage des mêmes morceaux qui, maintenant, doivent même passer avec succès le test d’une machine pour avoir une chance d’être diffusés« . Cette machine, c’est en réalité un logiciel espagnol, Hit Song Science (HSS), de plus en plus indispensable dans la trousse à outils du parfait petit « hit maker ».

A partir d’une vingtaine de critères tels que la mélodie, l’harmonie, la mesure ou le ton, HSS calcule les espoirs de succès de la chanson qui lui est soumise. Le logiciel a ainsi pu prédire l’énorme succès de Norah Jones à un moment où les producteurs misaient peu sur la chanteuse. Entre autres artistes « découverts » par HHS, l’on compte également Maroon 5, Anastacia, Jenifer Lopez ou Robbie Williams.

Grâce à son modèle mathématique (qui ignore toutefois totalement la qualité des textes), le logiciel édité par Polyphonic HMI aurait une fiabilité de 100%. « En obtenant une note supérieure à 7, le hit est en vue« , assure la société.

« Polyphonic HMI est partie du constat que depuis Beethoven, la musique qui plaît n’a pas changé dans son écriture, ce sont les styles, les instruments et la façon de produire qui ont évolué mais, une belle mélodie reste une belle mélodie.« 

Exception culturelle française ?

Jamais ne verrait-on un tel logiciel débarquer en France, pays de la sacralisation du droit d’auteur, de l’idéal du génie créateur, de l’imprescribilité du droit moral, et d’Annie Cordy de Mireille Mathieu ? (on nous rappelle qu’Annie Cordy est belge)

Et bien si.

« Après les Etats-Unis, l’Angleterre, l’Allemagne et l’Espagne, le système Hit Song Science arrive sur le marché français« , annonçait récemment Polyphonic HMI. Pour conquérir ce marché, la société a intégré dans sa base de données cinq ans de succès du TOP 50 français, qui viennent ainsi compléter une base existante de plus de 1,5 millions de titres. Arie Itah, agent France de l’éditeur espagnol (et artiste en comédies musicales à ses heures), explique que « pour obtenir des résultats probants sur le marché français, il était obligatoire d’intégrer à notre base de titres les succès de la variété française« . « Le logiciel ne pouvait être performant s’il ne prenait pas en compte cette spécificité« , ajoute-t-il.

Combien ça coûte ?

HSS s’adresse aux maisons de disques bien sûr, mais aussi aux distributeurs et aux radios qui y verront un « outil d’analyse de leur playlist« . Il n’est plus question de mettre sur le devant de la scène des artistes dont les spécialistes artistiques reconnaissent les talents, mais uniquement ceux qui obtiennent plus de 7 après un passage à la moulinette numérique.

Plus que jamais peut-on parler d’industrie du disque.

Mais les compositeurs eux-mêmes « pourront bientôt soumettre leurs œuvres au verdict du Hit Song Science« . Il en coûtera 40 € pour l’analyse brute d’un titre, ou jusqu’à 15 000 Euros pour le suivi complet de la création de tout un album. Le client envoie sa chanson, et reçoit le rapport détaillé 24H plus tard. Bien sûr, on s’insurge de voir ainsi la créativité mise sur le côté, et l’on craint pour la diversité musicale. Mais Polyphonic assure qu’il n’y a rien à craindre. Par exemple, dit-elle, « il est apparu que la musique de U2 était très proche de certaines parties de l’œuvre de Beethoven« .

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