L’an dernier, des chercheurs de l’université de Rennes avaient conduit une étude sur le piratage en ligne. Ils avaient constaté que le téléchargement illégal avait progressé peu après la promulgation de la loi Hadopi. Si l’enquête reconnaît que la part des utilisateurs des réseaux peer-to-peer a effectivement baissé, le nombre d’internautes utilisant des solutions ignorées par la riposte graduée a au contraire augmenté.
Les conclusions des chercheurs de l’université de Rennes ont visiblement interpellé Christine Marin, députée UMP du Nord. Dans une question écrite adressée à Frédéric Mitterrand, elle s’interroge sur les mesures prises par le gouvernement pour que la Haute Autorité puisse s’attaquer aux plates-formes illégales de streaming ainsi qu’aux hébergeurs spécialisés comme RapidShare ou MegaUpload.
« Certains pays européens, comme l’Italie, ont décidé d’aller plus loin sur ce sujet en contrôlant la mise en ligne et la diffusion des contenus par un système d’autorisation préalable avec le décret Romani. Ce dispositif permet de contrôler les contenus mis sur de nombreux sites italiens de plus en plus utilisés pour échanger films et musiques, voire même les réseaux sociaux qui dépassent de plus en plus leurs cadres d’utilisation » écrit-elle.
Promulgué le 27 janvier 2010, ce décret oblige les diffuseurs de vidéos en ligne à obtenir une licence auprès de l’État. Officiellement, il s’agit d’une mesure voulue par le gouvernement Berlusconi pour se conformer aux règles européennes. Néanmoins, le président du conseil italien est également à la tête de MediaSet, un empire médiatique. Or celui-ci livre une guerre à YouTube, pour limiter le piratage de ses émissions.
Le décret a été sévèrement critiqué en Italie et à l’étranger. « Sous couvert de protéger les droits d’auteur, notamment les chaînes de télévision contrôlées par le premier ministre Silvio Berlusconi, le gouvernement s’arroge un contrôle direct sur les télévisions indépendantes diffusées sur le web. Leur existence dépendrait alors d’une licence accordée par le ministère et non par un juge » a fustigé Reporters Sans Frontières.
« Le décret en question instaure un système d’autorisation préalable à l’exercice de la liberté d’expression afin d’éviter d’éventuelles futures violations de droits protégées par la propriété intellectuelle. Cette disposition est en contradiction totale avec la conception de la Cour européenne des droits de l’homme de la liberté d’expression et avec l’article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne » a poursuivi l’ONG.
C’est donc ce modèle-là que défend Christine Marin. Selon elle, « ce système peut d’autant plus être assuré par la Haute Autorité qui assure déjà le ciblage des utilisateurs des réseaux peer-to-peer. Elle lui demande de bien vouloir préciser quelles mesures il compte prendre pour remédier à cette problématique« .
L’une des mesures envisagées par le gouvernement français pourrait être le rapprochement entre la Haute Autorité et le CSA. Cette piste avait été préconisée lors d’un rapport parlementaire consacré aux autorités administratives indépendantes, rédigé par Christian Vanneste (UMP) et René Dosière (PS). « Les rapporteurs s’interrogent sur la justification de l’existence de la Haute Autorité » écrivaient-ils.
« Certes, la création d’une nouvelle autorité indépendante chargée de surveiller le respect des droits et de lutter contre le piratage jouit d’une visibilité maximale pour les auteurs. Mais on peut se demander pourquoi l’Arcep, chargée de réguler les communications électroniques, dont fait partie l’Internet, ne pourrait pas en être chargée. Les rapporteurs sont donc d’avis d’intégrer la Hadopi dans l’autorité qui remplacera à la fois le CSA et l’Arcep« .
Si l’idée d’une fusion avec l’Arcep n’a pas convaincu le président du CSA, celui-ci a néanmoins défendu l’idée que les logiciels de contrôle parental puissent bloquer l’accès aux sites de vidéos qui n’auront pas reçu un label de l’autorité administrative. Le CSA a déjà vu ses pouvoirs renforcés grâce à un décret lui permettant de suspendre la diffusion en France de services de VOD édités à l’étranger et violant la loi française.
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