Mise à jour 2 : la présidente de l’Hadopi, Marie-Françoise Marais, recevra vendredi l’UPP pour tenter de déminer la crise.
Mise à jour : L’Hadopi pourra-t-elle ignorer les revendications de l’Union des photographes sans en subir de conséquences pour son image auprès des professionnels ? Déjà plus de 4500 signatures ont été recueillies par l’UPP. Si l’on en croit la liste des signataires, il s’agit bien sûr pour une très grande majorité de photographes, auxquels viennent se joindre aussi des illustrateurs et dessinateurs, et quelques étudiants probablement inquiets de la viabilité de la profession pour laquelle ils se forment.
Article du 4 mai 2011 –
Le label que doit accorder l’Hadopi aux offres légales devrait en principe satisfaire les artistes qui font de leur art un métier, et qui militent depuis longtemps pour la protection de leurs droits de propriété intellectuelle. Mais la nature des candidats au label peut parfois poser problème, au point que des auteurs se retournent aujourd’hui contre des projets de labellisation. Moins au titre des droits d’auteur qu’au titre du modèle économique proposé.
C’est le cas de l’Union des Photographes Professionnels (UPP), qui a publié une pétition pour demander à la Haute Autorité de ne pas accorder son label « Offre Légale » au site Fotolia. Sa demande de labellisation est parue le 21 avril sur le site de l’Hadopi, qui présente ainsi le service :
Fotolia est spécialisée dans la vente d’images et de vidéos d’illustrations ‘libres de droits’ (utilisation sur tout support, quel que soit le mode de diffusion ou le territoire). Elle propose sur son site, plus de 12 millions de photos, illustrations vectorielles ou vidéos pour un usage personnel ou professionnel (fonds d’écran, blogs, sites web, diaporamas, photomontages, publicités, brochures…). Fotolia compte aujourd’hui plus de 2,5 millions d’utilisateurs
Mais le site est extrêmement mal vu par l’UPP, qui lui reproche de proposer « pour des usages professionnels (presse, publicité, édition, etc.) une offre de photographie dites » libres de de droit » à des prix dérisoires (0,14 euros)« . Selon elle, l’appellation « libre de droits » est « mensongère » et « bafoue le droit moral et patrimonial des auteurs« . L’organisation qui représente plus de 5000 photographes estime qu’en « proposant une offre pour quelques centimes d’euros, Fotolia viole également l’article 1591 du code civil qui sanctionne l’absence de prix réel et sérieux« .
Un combat plus économique que juridique
Contacté, le président de l’UPP Philippe Schlienger nous explique que selon l’organisation, Fotolia ne respecte pas l’encadrement des contrats de cession des droits d’auteur imposé par le code de propriété intellectuelle, qui impose qu’elle soit réalisée pour une durée définie, des supports explicitement précisés, et une zone géographique déterminée. Sur son site, Fotolia indique que ses fichiers sont « libres de droits » parce qu’ils peuvent être utilisés : sans limite de temps, sans limite du nombre d’utilisations, et sans limite géographique.
Cependant, des licences sont bien signées par les photographes, qui acceptent les conditions. « Fotolia propose une licence d’utilisation d’image sans limite de temps mais, à la demande des auteurs, nous pouvons tout à fait limiter les usages dans la durée. Nous respectons le Droit français à la lettre et pour les 14 pays dans lesquels nous sommes présents, nous adaptons l’application des contrats à la réglementation locale. Le fait d’avoir commencé en France nous permet de respecter la législation la plus sévère« , expliquait récemment le Directeur général de Fotolia France, Guillaume Le Bleis, au Groupement national des photographes professionnels (GNPP).
Le droit d’auteur et son encadrement contractuel sert en fait de prétexte à l’UPP, qui reproche surtout à Fotolia son modèle économique low-cost, qui pousse les prix de toute la profession vers le bas, en permettant surtout à des amateurs éclairés de faire concurrence aux professionnels. « Fotolia participe massivement à l’effondrement du marché de la photographie et à la grave crise que traversent les photographes professionnels et les agences« , assure l’UPP, qui a envoyé mardi un courrier à l’Hadopi. Mais selon Guillaume Le Bleis, qui avait intimé l’Hadopi de combattre le piratage des photographies, « si le coût ne s’était pas adapté aux besoins du marché, un maximum d’images seraient simplement volées », et « la baisse du coût unitaire des photos engage les entreprises à en utiliser plus« . « Avec l’UPP j’ai l’impression que nous sommes le bouc émissaire du secteur« , se plaint-il.
L’Hadopi ne sera pas juge à la place du juge
De son côté, l’Hadopi ne devrait pas céder à la pression, même si à la mi-journée près de 500 photographes avaient déjà signé la pétition. Elle nous explique qu’en vertu du décret sur la procédure de labellisation, son pouvoir d’appréciation se limite à recueillir les oppositions éventuellement formulées par les ayants droit dont les œuvres sont diffusées illégalement par les candidats au label, pas à vérifier la licéité des contrats passés avec les auteurs. Or les photographies des membres de l’UPP n’étant pas diffusées par Fotolia, le lobby n’a pas d’objection recevable à opposer. Le label devrait donc, selon toutes vraisemblances, être accordé au terme de la période d’examen.
C’est d’ailleurs à cause de ce manque de pouvoir d’appréciation que nous avions écrit, lors de la publication du décret fixant la procédure de labellisation, que même des sites comme The Pirate Bay ou RapidShare pourraient obtenir le label.
Les premiers labels Offre Légale devraient être accordés fin mai ou début juin. Débutera alors sa grande campagne de communication, et le lancement de son sigle PUR, « Promotion des Usages Responsables », en lien avec l’offre légale.
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