Il y a un an, en août 2010, l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ARJEL) avait obtenu du tribunal de grande instance de Paris qu’il ordonne aux FAI de bloquer l’accès au site de paris en ligne StanJames, par tous moyens (« par blocage du nom de domaine, de l’adresse IP connue, de l’URL, ou par analyse du contenu des messages« ). L’ordonnance est devenue inutile lorsque Stanjames a lui-même décidé de bloquer l’accès aux clients français, mais l’opérateur Darty avait tout de même maintenu son appel, et demandé à la cour de transmettre à la cour de cassation deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC).
La première portait sur la possible violation de la présomption d’innocence induite par une procédure de blocage qui peut être déclenchée sans que le site visé ne puisse « jamais bénéficier du droit de contester en justice de façon contradictoire et en temps utile l’analyse du Président de l’ARJEL« . La seconde portait sur l’absence de publication du décret censé fixer les indemnités perçues par les opérateurs lorsqu’ils mettent en œuvre, pour le compte de l’Etat, les mesures de blocage dont le coût peut être très élevé s’il y a obligation de résultat. Darty contestait l’obligation d’obéir aux ordonnances de blocage tant que le décret n’était pas publié par le gouvernement.
Or comme nous l’apprend PC Inpact, la Cour d’appel de Paris a refusé de transmettre les deux QPC.
Sur la première, relative à la présomption d’innocence, la Cour d’appel estime que la procédure « s’appuie sur la constatation d’un fait objectif, à savoir l’absence par l’opérateur d’autorisation » de proposer des jeux d’argent en ligne en France. Il n’y a donc pas besoin de permettre au site visé d’apporter des arguments contradictoires. Elle ajoute que le site concerné « peut de plus intervenir volontairement devant le tribunal de grande instance, qu’il est loisible aux fournisseurs d’accès et/ou à l’hébergeur de l’appeler en intervention forcée, que ses droits sont donc préservés« .
Sur la seconde, relative au principe de l’égalité devant les charges publiques via l’indemnisation des FAI, la cour d’appel de Paris estime que « la société Darty ne justifie pas à l’évidence de la violation de ce principe par l’article incriminé« , puisque celui-ci prévoit précisément qu’il y ait indemnisation. Si ça n’est pas le cas en pratique ça n’est pas la faute de la loi, qui n’est pas inconstitutionnelle, mais la faute du gouvernement qui traîne des pieds pour publier le décret. C’est donc éventuellement devant le juge que l’absence d’indemnisation peut être soulevée pour justifier de ne pas mettre en œuvre le blocage, mais ça n’est pas un motif de saisine du Conseil constitutionnel.
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