Pour montrer à ses élèves qu’il n’était pas dupe sur la façon dont ils utilisent internet pour tricher, un prof de lycée a monté de toute pièce un sujet d’examen dont les informations disponibles sur Internet avaient été écrites par lui. Mais la conclusion qu’il en tire ne va sans doute pas assez loin dans la réforme éducative qu’il faut adopter.

Loys, un professeur de lettres classiques de 36 ans qui enseigne dans un lycée parisien, a publié un billet de blog très intéressant sur la manière dont il a floué ses élèves de 1ère pour les prendre en flagrant délit de plagiat, en tirer des enseignements.

Il raconte d’abord que l’année précédente, il avait remarqué que ses élèves utilisaient des sujets corrigés qu’ils trouvaient sur Internet pour quelques euros, y compris pendant les examens faits en cours. « En tapant une des expressions sur Google, j’ai réalisé que l’élève avait utilisé son smartphone pendant le cours et recopié le premier corrigé venu sur Google en tâchant maladroitement de le maquiller« , se souvient-il. C’est alors qu’il décide, comme il le dit, de « pourrir le web » pour s’adonner à une petite expérience.

Lors des vacances d’été, l’enseignant ressort de sa bibliothèque un poème baroque quasiment introuvable sur Internet, et se met alors à truffer le web de faux commentaires à son sujet, en utilisant un mot clé différent sur chaque intox pour en retrouver l’origine. Il modifie l’entrée Wikipédia consacrée à l’auteur, fais lui-même les questions et les réponses sur des forums dédiés aux étudiants, et pousse le vice jusqu’à soumettre de faux corrigés à deux sites de corrigés d’examens payants, Oodoc.com et Oboulo.com,  » dont les comités de lecture ont validé sans barguigner mon lamentable commentaire, leur but étant moins celui d’une diffusion humaniste du savoir que purement mercantile« .

L’effet escompté est bien là, lorsqu’il reçoit les copies de l’examen qu’il avait préparé. « Sur 65 élèves, 51 élèves – soit plus des trois-quart – ont recopié à des degrés divers ce qu’ils trouvaient sur internet, sans recouper ou vérifier les informations ou réfléchir un tant soit peu aux éléments d’analyses trouvés, croyaient-ils, au hasard du net« . Parfois, les élèves recopiaient des interprétations totalement farfelues.

Le prof de lettres en tire alors la conclusion un peu simpliste pour ses élèves qu’il ne faut pas avoir confiance en Internet (c’est lui qui l’a « pourri » d’erreurs), et savoir réfléchir par soi-même. « Les élèves au lycée n’ont pas la maturité nécessaire pour tirer un quelconque profit du numérique en lettres. Leur servitude à l’égard d’internet va même à l’encontre de l’autonomie de pensée et de la culture personnelle que l’école est supposée leur donner« .

Peut-être vaut-il mieux accepter que l’accès des élèves au numérique est désormais une donnée, et composer avec cette nouvelle donne.

Si l’on dit aux élèves qu’ils peuvent recopier ce qu’ils trouvent sur Internet, car ça n’est pas l’exactitude des informations qu’ils trouvent qui est notée, mais la qualité du raisonnement qu’ils déploient grâce à ces informations, l’école aura certainement fait un grand progrès. Il faut que l’école serve à « apprendre à apprendre« .

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