L’éditeur VideoLAN, en charge du projet de lecteur multimédia VLC, a saisi la Haute Autorité pour obtenir le droit de lire les Blu-Ray verrouillés par des mesures techniques de protection. L’Hadopi dispose en effet, en plus des missions de riposte graduée et d’offre légale, des attributions de l’ancienne Autorité de régulation des mesures techniques.

Haro sur les DRM ! Six ans après la création des disques Blu-Ray, l’éditeur du célèbre lecteur multimédia VLC, le français VideoLAN, passe à l’offensive. Profitant de certaines dispositions contenues dans la loi Hadopi, les responsables du projet ont demandé, selon une information du Point, l’autorisation d’intégrer légalement et sous licence libre les clés de protection des disques Blu-Ray dans le logiciel libre.

Interrogé par l’hebdomadaire, le président de l’association VideoLAN justifie cette saisine de l’Hadopi par l’ambition de « faire avancer le droit sur une question très compliquée. Notre but est juste de faire de la lecture de DVD. Mais la lecture, en informatique, c’est mécaniquement de la copie. Nous contournons déjà les mesures techniques de protection des DVD depuis 2003, et personne ne nous est tombé dessus« .

Sauf que « la loi qui autorise le contournement des DRM au nom de l’interopérabilité dispose aussi que le mécanisme doit respecter le droit d’auteur. Une contradiction absolue, puisque les DRM sont toujours protégés par le droit d’auteur » souligne Jean-Baptiste Kempf. D’où l’idée de passer par la Haute Autorité, qui doit déterminer ce semestre si elle nomme un expert ou si elle rend directement un avis.

L’Hadopi régule les DRM

Il faut savoir qu’en marge de l’installation de la riposte graduée et du développement de l’offre légale, la loi Hadopi a dissout l’Autorité de régulation des mesures techniques (ARMT), que la loi DADVSI de 2006 avait créé, pour intégrer ses compétences dans la jeune Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet.

Or, le décret n°2009-1773, relatif à l’organisation de la Hadopi, dispose que « le collège de la Haute Autorité délibère notamment sur les procédures applicables en matière d’interopérabilité des mesures techniques mentionnées à l’article L. 331-32 […] et sur les saisines pour avis en matière d’interopérabilité des mesures techniques et d’exceptions au droit d’auteur et aux droits voisins mentionnées à l’article L. 331-36« .

Cette mesure, héritée de l’ARMT, donne aux développeurs et aux éditeurs la possibilité de réclamer l’accès aux spécifications techniques des formats de protection dans un but d’interopérabilité. Une mesure qui intéresse grandement VideoLAN, qui aimerait pouvoir lire librement et légalement les Blu-Ray chiffrés par des mesures techniques de protection (AACS et BD+).

Mais si la Haute Autorité dispose des outils légaux et techniques pour entendre la demande de VideoLAN, que pourra-t-elle vraiment faire ? Dans le détail, l’Hadopi désigne un médiateur qui devra dégager un terrain d’entente entre les différentes parties en présence. Si la médiation échoue, la Haute Autorité dispose de deux choix : rejeter la demande ou déterminer d’éventuelles contraintes.

Rejeter la demande ou user de la contrainte

« La Haute Autorité rend une décision motivée de rejet de la demande ou émet une injonction prescrivant, au besoin sous astreinte, les conditions dans lesquelles le demandeur peut obtenir l’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité et les engagements qu’il doit respecter pour garantir l’efficacité et l’intégrité de la mesure technique, ainsi que les conditions d’accès et d’usage du contenu protégé« .

Sony, qui a inventé le Blu-Ray, se montrera-t-il sensible aux arguments qu’avancera le médiateur désigné par la Haute Autorité ? Rien n’est moins sûr. Le consortium AACS LA, qui regroupe IBM, Intel, Microsoft, Panasonic, Toshiba, Walt Disney et Warner Bros, est à l’origine de ces DRM. Et celui-ci ne devrait pas voir d’un très bon oeil la diffusion du code source des clés de protection du Blu-Ray dans un logiciel libre.

Selon les industriels, une telle diffusion offrirait un terrible coup de pouce à tous les pirates qui cherchent à dupliquer les contenus sans autorisation et à les échanger sur Internet. C’est en partie pour cette raison qu’Apple s’était opposé au décret n°2009-1773, estimant alors que celui-ci pourrait l’empêcher de jouir exclusivement de son format de verrou numérique, FairPlay.

Reste désormais à savoir où va finir la saisine de VideoLAN. Selon Le Point, le dossier « est en cours d’instruction administrative » et l’Hadopi se serait même montré assez favorable à la démarche de VideoLAN. Une première rencontre « constructive » entre des représentants de VideoLAN et de l’Hadopi a d’ailleurs eu lieu il y a quelques mois, afin de défricher le terrain.

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