L’étude est loin d’être parfaite sur un plan méthodologique, mais elle vient s’ajouter à une série de publications dont les conclusions sont similaires. Torrentfreak révèle qu’une étude financée par la Commission Européenne, réalisée par l’Institut pour les Etudes Prospectives Technologiques situé à Séville, en Espagne, conclut qu’il n’y a pas d’incidence négative du téléchargement illégal de musique sur la consommation légale. Mieux, il y aurait même un léger effet positif du piratage, quoique plus faible que celui engendré par le streaming légal.
Pour arriver à ces conclusions, les chercheurs ont analysé des données très précises provenant du programme de mesure d’audience Nielsen NetView, en observant les clics opérés pendant toute l’année 2011 par 25 000 internautes répartis à parts égales entre la France, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne et la Grande-Bretagne (on peut donc noter un premier biais dans l’étude, puisque les internautes en question sont des cobayes qui se savent observés, même anonymement, et qui n’ont donc sans doute pas le comportement d’un internaute lambda).
Après avoir écarté ceux qui n’allaient jamais sur des sites liés à la musique, ils ont conservé un échantillon de 19 290 abonnés à internet. Puis, les chercheurs ont isolé 779 sites de consommation musicale, légaux et illégaux, qui ont reçu un total de plus de 4,9 millions de clics. Ils ont alors regardé les relations statistiques entre les visites de sites de téléchargement illégaux, les visites de sites de streaming légaux, et les visites de sites marchands liés à la musique.
« Le piratage de musique ne devrait pas être vu comme un sujet d’inquiétude »
Selon leurs résultats « une augmentation de 10 % des clics sur les sites de téléchargement illégaux conduit à une augmentation de 0,2 % des clics sur les sites d’achats légaux« . Dit autrement, « cela veut dire que les clics sur les sites d’achats légaux (de musique) auraient été 2 % plus faibles en l’absente de sites de téléchargement illégaux« , et les chercheurs indiquent même que l’effet serait le double en France (malgré Hadopi) et en Grande-Bretagne.
Néanmoins, il est difficile d’en conclure la généralité que le piratage serait bénéfique aux ventes, puisque les sites de streaming légaux ont un effet plus fort encore. 10 % d’augmentation sur les sites de streaming légaux conduirait ainsi à une augmentation de 0,7 % de clics sur les sites d’achat ; et là encore l’effet est plus prononcé en France avec 150 % de clics en plus qu’en Allemagne.
« Tous ces résultats suggèrent que la vaste majorité de la musique qui est consommée illégalement par les particuliers dans notre échantillon n’aurait pas été achetée légalement si les sites de téléchargement illégaux ne leur avaient pas été disponibles (…) Nos conclusions suggèrent que le piratage de musique ne devrait pas être vu comme un sujet d’inquiétude croissant pour les titulaires de droits d’auteur dans l’ère numérique« , écrivent les auteurs de l’étude, Luis Aguiar et Bertin Martens.
Leurs conclusions rejoignent notamment celle de Robert Hammon, du chercheur Patrick Waelbroeck, du laboratoire breton M@rsoin, ou même les propres études d’Hollywood.
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