L'affaire rappelle évidemment les censures de l'application de lecture de BD Comic Reader, accusée d'offrir l'accès à une BD violente, ou celle du caricaturiste américain Mark Fiore, qui avait été temporairement banni de l'App Store alors qu'il avait gagné le prix Pulitzer 2010. Pour ne pas risquer de choquer quelques consommateurs à la sensibilité surdéveloppée, Apple préfère interdire certains types de contenus sur ses services incontournables de distribution d'applications ou d'oeuvres, quitte à affronter régulièrement des accusations d'atteinte à la liberté d'expression. Il le fait par ailleurs avec une manière des plus critiquables.
Ainsi, IDBoox révèle que la plateforme de bandes dessinées Izneo, qui propose sur abonnement l'accès aux BD de certains des plus grands éditeurs (Casterman, Dargaud, Dupuis, Gallimard, Kana, Le Lombard…) a dû supprimer sur sa version iPad rien moins que 1500 bandes dessinées, soit une part importante de son catalogue initial de 4000 BD.
Pourquoi ? Parce qu'à la veille du week-end pascal, vers 20h, "l’un des responsables d’Izneo a été appelé par une personne travaillant pour l’Apple Store aux Etats-Unis", et "ordre a été donné de nettoyer les différents ebooks présents dans l’application car ils étaient jugés pornographiques pour les américains". Mais l'employé d'Apple se refuse à livrer toute précision sur les BD concernées ou même sur le type de contenus précisément concerné…. et donne seulement 30 heures à Izneo pour faire le ménage. Sinon, l'application disparaît purement et simplement de l'iPad, ce qui causerait un préjudice économique énorme à la plateforme et à ses partenaires.
"Résultat, pour ne pas risquer d’être banni de l’Appstore, Izneo a fait un grand ménage, la moindre BD dévoilant un sein, un décolleté provoquant, une courbe ou évoquant un geste suggestif a été retirée manu militari", rapporte IDBoox. Loin de ne supprimer que les BD érotiques, Izneo se retrouve à supprimer certaines des bandes dessinées les plus populaires comme Largo Winch, Treize, ou Blake et Mortimer. Pas question de ne supprimer ou censurer que les planches posant problème, puisqu'il s'agirait là d'une violation du droit moral de l'auteur, qui comporte le respect de l'intégrité de l'oeuvre.
Dans un premier temps, ce sont 2800 bandes dessinées qui ont été supprimées, avant d'en sauver 1300. Il reste 60 % du catalogue initial. Et plus aucune pin-up pour attirer le chaland. "Forcément les achats ont baissé et notre chiffre en a pâti", témoigne Izneo.
De quoi mettre en lumière le souhait du Conseil National du Numérique d'étendre le concept de la neutralité du net à une neutralité des plateformes d'accès à des contenus. L'affaire confirme en tout cas le problème que pose la domination internationale des plateformes américaines, qui imposent la vision américaine de la morale publique en niant la diversité des cultures.
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