Le Conseil d'Etat a rejeté l'essentiel des arguments formulés par Apple pour faire tomber les pouvoirs de régulation des DRM et des mesures techniques de protection confiés par la loi à la Hadopi. Il a simplement autorisé que des recours soient exercés contre le refus éventuel de classer confidentielles les informations transmises à la Haute Autorité.

Bien qu'essentiellement connue pour son rôle de distributrice de coups de bâtons à travers la riposte graduée et les avertissements qu'elle envoie massivement aux internautes coupables de partager des films et de la musique, la Haute Autorité pour la Diffusion des Oeuvres et la Protection des droits sur Internet (Hadopi) est aussi investie — entre autres — de pouvoirs de régulation des DRM. Il s'agit, au moins théoriquement, de faire en sorte que la nécessaire interopérabilité entre les plateformes de distribution de contenus et les dispositifs qui permettent de les lire soit assurée.

Apple, qui voit d'un très mauvais oeil l'obligation qui pourrait lui être faite de communiquer à des concurrents les moyens de lire les fichiers sous DRM distribués sur iTunes (films, séries, livres…), a très tôt attaqué ces aspects de la loi Hadopi. En 2006, la firme de Cupertino s'était déjà fâchée tout rouge contre l'ancienne Autorité de Régulation des Mesures Techniques (ARMT) créée par la loi DADVSI, et avait même menacé de ne pas ouvrir iTunes en France.

Il s'agit non seulement de protéger les contenus présents sur iTunes, pour s'assurer (musique à part) qu'ils ne puissent être lus que sur des appareils Apple, mais aussi de contrer une éventuelle décision favorable aux jailbreaks que pourrait prendre l'Hadopi.

En fin d'année dernière, le Conseil d'Etat avait rejeté les recours de FDN et Free contre les décrets Hadopi. Mais le 30 décembre 2013, le Conseil d'Etat a très partiellement validé le recours intenté par Apple contre le décret du 10 novembre 2010, qui encadre la labellisation des offres et la régulation des DRM.

S'il a validé l'essentiel du texte réglementaire, le juge de la légalité administrative a accepté d'annuler le dernier alinéa de l'article R331-65 du code de la propriété intellectuelle, qui limitait les possibilités de recours contre les décisions du président de l'Hadopi de classer confidentielles ou non les informations transmises par les concepteurs de DRM à l'occasion des litiges. 

"En ne permettant ainsi de contester la légalité des décisions prises par le président sur le fondement de l'article R. 331-65 qu'à l'occasion d'un recours contre la décision définitive adoptée par la Hadopi, ces dispositions font obstacle, le cas échéant, à l'exercice d'un recours ou d'une action en référé contre ces décisions devant le juge compétent", reconnaît le Conseil d'Etat. "Eu égard à l'ampleur et au caractère potentiellement irréversible des effets des décisions que le président de la Hadopi peut prendre en vertu de l'article R. 331-65, les dispositions du IV de cet article méconnaissent le principe général du droit au recours et les exigences liées au respect des droits de la défense".

Un maigre lot de consolation pour Apple.

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