Depuis un certain nombre d'années maintenant, l'organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) s'est engagée dans une réflexion portant sur l'assouplissement du droit d'auteur, en particulier à travers le développement des exceptions et des limitations, avec à la clé un possible (mais encore très hypothétique) traité international qui redéfinirait le périmètre du droit d'auteur.
Ces travaux ne sont pas apparus par hasard. Ils ont été provoqués par un constat, difficilement contestable. "Du fait de la mise au point de nouvelles technologies et de l’utilisation de plus en plus répandue de l’Internet dans le monde, on a considéré qu’il importait d’effectuer un rééquilibrage entre les intérêts des diverses parties prenantes", peut-on lire sur le site de l'OMPI dédié aux exceptions et aux limitations.
Assouplir, un agenda négatif
Cela étant, la position du comité permanent du droit d’auteur et des droits connexes (SCCR) rencontre des résistances importantes, à l'extérieur de l'institution spécialisée des Nations unies mais aussi en son sein. On se souvient par exemple des propos du directeur général, Francis Gurry, qui regrettait en 2011 que l'oreille se soit tendue vers ceux qui demandent un assouplissement des règles du droit d'auteur.
"Malheureusement ce que nous voyons dans le monde de la propriété intellectuelle ces 10 ou 15 dernières années, c'est que l'agenda tend à être un agenda négatif. Il tend à s'intéresser aux exceptions, aux limitations, et aux autres manières de ne pas avoir de propriété intellectuelle", regrettait-il. "Je suis très désireux de nous voir revenir avec un agenda positif".
Exceptions et limitations
Mais de quoi parle-t-on lorsque l'on évoque des exceptions et des limitations au droit d'auteur au sein de l'OMPI ?
Il s'agit d'aménagements "portant sur les activités pédagogiques, les bibliothèques et les archives et sur les personnes handicapées, en particulier les déficients visuels", note le SCCR. Ceux-ci sont considérés comme une étape par les partisans d'un rééquilibrage plus global du droit d'auteur (copie privée ou extension du fair use…), qu'ils perçoivent comme urgent et incontournable dans cette ère numérique.
Un mandat de travail à clarifier
Signe de ces vives tensions au sein et à l'extérieur de l'OMPI, la confédération internationale des sociétés d'auteurs et compositeurs (CISAC) est préoccupée par les limitations et exceptions à venir aux droit d'auteur sur le Net. Le magazine Édition Multimédi@ rapporte qu'à la suite de son assemblée générale, la CISAC demande "que le mandat du SCCR de l'OMPI soit clarifié avant la poursuite des travaux".
La CISAC, qui rassemble 231 sociétés d’auteurs de 121 pays dans tous les domaines artistiques (musique, œuvres dramatiques, littérature, audiovisuel et arts visuels), s'inquiète tout particulièrement de la redéfinition en cours du périmètre du droit d'auteur pour les bibliothèques, les services d'archives, les personnes handicapées et les établissements d'enseignement et de recherche.
La CISAC préfère le droit d'auteur éternel
Car en effet, le comité permanent du droit d’auteur et des droits connexes propose de "permettre aux bibliothèques et aux services d’archives de conserver les informations élaborées et diffusées sous une forme numérique et […] de donner accès à ces informations", selon les informations de nos confrères. La CISAC craindrait-elle de voir la manne du droit d'auteur fondre comme neige au soleil ?
Il faut dire que la CISAC est plutôt dans une logique inverse. Son président, Jean-Michel Jarre (qui a taclé Internet, manifesté son soutien à la loi Hadopi et suggéré de taxer les FAI), a proposé ce printemps, lors du Forum de Chaillot organisé par le ministère de la culture, la création "d'un droit d'auteur éternel qui permettrait de mieux financer la création".
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