Après son échec à faire obstacle à la délégation de nouveaux noms de domaine en .vin et .wine, la France a déclaré jeudi la guerre à l'ICANN, en jugeant qu'elle n'était "plus l'enceinte adéquate pour discuter de la gouvernance de l'Internet".

Le vin aura eu raison de l'entente cordiale entre la France et l'ICANN sur la gestion des noms de domaine. Malgré ses coups de semonces, la France n'a pas réussi lors de la 50ème réunion de l'organisation à obtenir satisfaction dans son combat contre les futus .vin et le .wine, dont elle estime qu'ils ne sont pas entourés des précautions nécessaires pour éviter la violation des indications géographiques protégées.

La secrétaire d'état au numérique Axelle Lemaire avait prévenu qu'il s'agirait d'un casus belli, et l'a confirmé dans un communiqué cinglant publié ce jeudi matin.

"Les autorités françaises prennent acte à regret du refus de l'ICANN de prendre en considération les mesures de sauvegarde proposées par les organisations de protection des indications géographiques. Elles vont en conséquence examiner toutes les mesures et actions propres à assurer aux producteurs de vins d’appellation d’origine comme aux consommateurs la protection indispensable contre les abus sur internet", prévient Bercy, qui demande à la Commission Européenne d'entrer également en rébellion.

"Les procédures actuelles de l’ICANN mettent en lumière son incapacité à prendre en compte les préoccupations légitimes des Etats et à garantir une gestion commune des ressources dans le sens du respect de la diversité culturelle et de l'équilibre des intérêts dans les secteurs économiques que ses décisions affectent".

Une nouvelle gouvernance en 2015 ?

Dans son communiqué (.pdf), Axelle Lemaire affirme que "l’ICANN n'est plus aujourd’hui l'enceinte adéquate pour discuter de la gouvernance de l'Internet", et indique qu'elle "proposera à ses partenaires européens et à toutes les autres parties intéressées d’engager une réflexion sur l’avenir de la gouvernance de l’internet fondée sur la transparence, la redevabilité, et l'égalité des parties prenantes".

La question du vin et de la protection de ses "marques" a donc achevé de convaincre la France de revenir sur la position atlantiste défendue en 2012 à Dubaï, lorsqu'elle avait refusé d'appuyer la proposition des puissances émergentes de créer un nouvel organe indépendant de gouvernance d'Internet, qui ne soit plus sous contrôle américain, mais plutôt rattaché à l'ONU. 

Les choses avaient déjà bougé ces derniers mois, après l'annonce des Etats-Unis d'un abandon de sa souveraineté sur l'ICANN. Lors de la conférence NETMundial au Brésil, les négociateurs se sont mis d'accord pour renforcer le rôle de l'IGF (Internet Governance Forum), et pour mettre en place de nouvelles règles d'ici 2015, basées sur les propositions d'un groupe de travail de l'ONU.

Le plus dur reste cependant à faire : se mettre d'accord sur les modalités de cette nouvelle gouvernance, qui devra concilier aussi bien les positions des Etats-Unis et de l'Europe que celles de la Russie, de l'Inde ou du Brésil.

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