Le blocage administratif de sites ayant des contenus visant à "provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire l’apologie de ces actes" est présentée par le ministère de l'intérieur comme une forme de préservatif du Net. Il doit éviter aux internautes sains d'attraper cette maladie contagieuse qu'est l'apologie du terrorisme et l'auto-radicalisation.

On trouvait déjà la même formulation il y a cinq ans lorsqu'il s'agissait de justifier le blocage sans juge des sites pédopornographiques. C'était également le titre du récent rapport de Marc Robert sur la cybercriminalité, qui promeut une privatisation de l'action judiciaire sur Internet : "protéger les INTERNAUTES" (avec majuscules).

Dans l'étude d'impact qui accompagne le projet de loi antiterroriste présenté par Bernard Cazeneuve, le ministère de l'intérieur assure au sujet du blocage des sites pouvant inciter au terrorisme qu' "une plus grande protection des internautes est l’objectif premier des mesures proposées".

"Il s’agit, d’une part, de protéger l’internaute de bonne foi de contenus non recherchés par lui et, d’autre part, de gêner l’accès volontaire de certains internautes à ces contenus de propagande afin d’éviter que ne se diffuse la propagande terroriste", justifie le ministère de l'intérieur.

"Pour cela, le blocage administratif présente l’avantage de pouvoir traiter un grand nombre de sites ou de pages internet dans des délais plus brefs que ceux résultant du blocage judiciaire. Il permet donc de concilier l’efficacité de la mesure de prévention avec le respect des droits et libertés dès lors que cette mesure de police est susceptible de recours devant le juge".

Ce dernier point est d'une hypocrisie totale, puisqu'à l'instar des sites pédopornographiques, une grande partie du problème réside dans l'absence de publication de la liste des sites bloqués. Comment s'opposer à une décision qui n'existe pas officiellement, faute de publication ? En l'état actuel de la loi, les éditeurs des sites internet bloqués ou dont certaines pages sont filtrées ne sont pas informés qu'ils sont ainsi placés sur une liste noire transmise aux FAI. Ils n'ont donc ni la possibilité de s'opposer en amont à la mesure s'ils la jugent abusive, ni de s'y opposer a posteriori.

Le seul qui peut éventuellement s'opposer à la mesure et qui devient l'ultime défense de la liberté d'expression devient le FAI, s'il fait l'effort de regarder ce qu'on lui demande de bloquer, et s'il a le courage de s'opposer à l'Etat en demandant qu'un site soit retiré de la liste.

Le blocage administratif n'est donc pas une mesure prise POUR les internautes mais bien CONTRE les internautes. Contre leurs droits et contre leurs libertés. Ce qui est, en soit, la première victoire du terrorisme.

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