Les États-Unis ont financé indirectement le développement du réseau TOR en 2013. Un soutien qui n'est en réalité pas nouveau et qui peut s'avérer paradoxal au regard des efforts mis en œuvre par la NSA pour casser ses protections. Mais des éléments peuvent être avancés pour expliquer cette curiosité.

Voilà un comportement qui est pour le moins paradoxal, en apparence en tout cas. Depuis que la surveillance de masse mise en place par les États-Unis a été révélée au grand jour, des documents confidentiels ont montré que la NSA, pourtant dotée de moyens colossaux, ne serait pas capable de briser l'anonymat d'un utilisateur du réseau TOR, pas plus qu'elle ne serait en mesure de le faire tomber.

Bien sûr, les difficultés que rencontre l'agence de sécurité nationale américaine ne l'empêchent pas d'essayer quand même. En fait, elle obtiendrait des succès indirects grâce au programme EgotisticalGiraffe. Celui-ci vise à identifier et surveiller des usagers en exploitant des outils destinés à capter et analyser le trafic, mais aussi de profiter des vulnérabilités au sein d'autres logiciels utilisés par les cibles.

Mais alors que la NSA cherche à abattre les murs protecteurs du réseau TOR, le gouvernement américain soutient leur construction. Dans son bilan financier (.pdf) pour l'année 2013 dont le Guardian s'est fait l'écho, il est en effet indiqué qu'une partie des fonds permettant au projet de perdurer provient des caisses de Washington. L'année dernière, le versement s'est élevé à plus de 1,82 million de dollars.

À première vue, l'attitude des États-Unis vis-à-vis de TOR paraît illogique. Pourquoi donc chercher à entretenir le développement d'un réseau qui propose de renforcer l'anonymat et la sécurité de ses utilisateurs sur Internet alors même qu'une agence gouvernementale – dont les missions sont jugées essentielles par Washington – s'emploie à le mettre à terre, afin de connaître les faits et gestes de ceux qui l'emploient ?

Paradoxal ? Pas totalement

En fait, deux explications, qui ne s'excluent pas, peuvent être avancées pour expliquer la position du gouvernement américain.

D'abord, le soutien financier des USA, dont l'existence n'est pas fondamentalement nouvelle, dans la mesure où la Washington Post en parlait déjà l'année dernière, pourrait avoir pour objectif inavoué d'orienter le développement de TOR, avec le concours du GCHQ, les services secrets britanniques. Cette piste a été avancée l'an dernier par le journal britannique.

Ensuite, les efforts de la NSA pour casser TOR ne signifient pas que ce réseau ne sera plus pertinent si jamais elle y parvient. Supposons que la NSA réussisse à passer outre la sécurité de TOR, rien ne permet de dire que les autres agences de renseignement y parviendront à leur tour. Le réseau resterait donc impénétrable pour ces dernières et donc intéressant pour les USA, dans certaines circonstances.

Rappelons en effet que le principe du routage en oignon sur lequel s'appuie le réseau TOR est né dans le cadre de recherches menées par le laboratoire de recherche de la marine des États-Unis avec pour objectif de trouver une méthode solide pour protéger les communications gouvernementales.

( photo : NSA )

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