Dans le cadre de la lutte contre la pédopornographie en ligne, Google a déployé l'an dernier un nouvel algorithme de recherche visant à contrer les requêtes cherchant à obtenir des fichiers représentant des mineurs impliqués dans des actes sexuels. Cette politique, conduite en partenariat avec Microsoft, a permis de bloquer les résultats d'au moins 100 000 requêtes spécifiques et de déréférencer certains contenus.
Google a signalé un usager
En réalité, les efforts de Google contre la pornographie infantile ne se limitent pas au seul moteur de recherche. YouTube, par exemple, a mis au point une technologie de reconnaissance et de marquage des vidéos pédopornographiques afin d'empêcher automatiquement leur hébergement sur YouTube, ainsi que sur toutes les plateformes qui utiliseront ce filtre. Des vérifications similaires existent sur Google Images.
Mais Google ne s'arrête pas uniquement à la partie publique de ses services. L'entreprise américaine procède également à un contrôle des contenus lorsqu'ils transitent sur des produits dont l'accès s'avère plus restreint, comme Gmail, son service de messagerie. La preuve, puisque Google a signalé aux autorités un internaute qui avait envoyé des photos pédopornographiques par mail.
Un cas particulier
Selon les explications de la police de la ville de Houston relayées par les médias, Google a d'abord détecté les photos d'une jeune fille dans le courrier électronique du suspect. L'entreprise américaine a ensuite signalé ce cas au centre national pour les enfants disparus et maltraités (National Center for Missing and Exploited Children), qui a ensuite relayé l'information à la police.
Les forces de l'ordre ont alors obtenu un mandat pour chercher des informations chez le suspect puis l'ont arrêté. Selon la chaîne locale de Houston KHOU Channel 11 News, l'affaire est particulière : l'homme est en effet connu des services de police. C'est un délinquant sexuel enregistré, reconnu coupable dans une affaire d'agression sexuelle sur un enfant en 1994.
Un curseur très difficile à placer
Dans cette affaire, c'est l'articulation entre plusieurs impératifs qui est délicate : l'impératif de lutter contre la pédopornographie, qui est une activité criminelle détestable, et l'impératif de respecter la vie privée des individus, qui est une liberté fondamentale. Sans parler du propre rôle de Google, société privée, qui se retrouve dans un rôle d'auxiliaire de police.
Or, comment placer le curseur ? Faut-il donner une priorité absolue à la lutte contre la pédopornographie, quitter à fouler au pied les principes sur lesquels reposent nos sociétés ? Autrement dit, comment positionner correctement le curseur ? Il n'y a évidemment pas de réponse simple à ces questions, qui interrogent sur les concessions que les individus sont prêts à faire au nom d'une cause juste.
Google scanne déjà les mails
Ceux qui espèrent la protection absolue de leur vie privée sur Gmail devraient relire les conditions d'utilisation du service, qu'ils sont censés avoir lues lorsqu'ils se sont inscrits sur le service. Toutefois, le document ne précise pas que l'analyse à des fins de sécurité couvre aussi les fichiers de pornographie infantile. Or, peut-être que d'autres contenus illicites sont aussi visés en secret ?
"Nos systèmes automatisés analysent vos contenus (y compris les e-mails) afin de vous proposer des fonctionnalités pertinentes sur les produits, telles que des résultats de recherche personnalisés, des publicités sur mesure et la détection des spams et des logiciels malveillants. Cette analyse a lieu lors de l'envoi, de la réception et du stockage des contenus".
Une analyse régulièrement critiquée
La capacité qu'a Google d'analyser automatiquement le courrier de ses utilisateurs n'est pas une information nouvelle. En fait, des critiques ont émergé dès le lancement du service, en 2004. Celles-ci réapparaissent régulièrement, selon l'actualité. Ainsi, Google a-t-il été de nouveau critiqué en 2010. Trois ans plus tard, ce sont les commentaires de la firme américaine lors d'un procès qui ont fait grand bruit.
"Tout comme l'expéditeur d'un courrier à un collègue ne peut être surpris que l'assistant de ce dernier l'ouvre à son intention, les personnes qui se servent aujourd'hui d'un service de messagerie en ligne ne peuvent être étonnés si leurs e-mails sont traités par le fournisseur du service utilisé par le destinataire", avait commenté l'entreprise américaine."Une personne n'a aucune attente légitime en matière de vie privée [à avoir] dans les données qu'elle confie volontairement à des tiers".
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