Il risquait la peine de mort, et c'est finalement une peine peut-être plus douloureuse encore qui lui a été infligée. Alors que le monde entier s'unit pour défendre la liberté d'expression après l'assassinat de sang froid à Paris de douze personnes liées directement ou indirectement à Charlie Hebdo, le blogueur saoudien Raif Badawi a reçu vendredi ses 50 premiers coups de fouets après sa condamnation pour "insulte à l'islam". Le régime dans lequel s'applique le courant le plus intolérant mais aussi le plus minoritaire de l'islam, le wahhabisme, a condamné l'homme à recevoir au total 1000 coups de fouets sur deux semaines, et à passer dix ans en prison.
Enfermé depuis le 17 juin 2012 dans les geôles saoudiennes, Raif Badawi avait été le fondateur en 2008 d'un site intitulé "Free Saudi Liberals", sur lequel il critiquait des figures de l'autorité religieuse en Arabie Saoudite, et demandait une libéralisation morale du pays. Il avait été arrêté et mis en accusation pour avoir "insulté l'islam à travers un moyen de communication électronique", et fut également poursuivi du crime d'apostasie, c'est-à-dire de renoncement à l'islam.
OFFICIELLEMENT OPPOSÉE A LA TORTURE ET AUTRES TRAITEMENTS INHUMAINS
En première instance, le blogueur avait été condamné à 7 ans de prison et 600 coups de fouet, pour avoir exercé ses droits de l'homme, qui ne sont pas reconnus en Arabie Saoudite. Même s'il se doit en principe de respecter la Déclaration Universelle de 1948 en vertu de son adhésion à l'ONU, le pays n'est pas signataire des conventions internationales de 1976 qui précisent les engagements à respecter.
L'Arabie Saoudite a tout de même signé certaines conventions spécialisées, dont celle de 1984 contre la torture et autres traitements cruels, inhumains, ou dégradants, qui stipule à son article 1er que "le terme "torture" désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment (…) de la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis". Mais il faut croire que l'Arabie Saoudite ne juge pas que le fait de fouetter un homme est une douleur physique ou mentale.
Quoi qu'il en soit, même si le pays a signé cette convention, il l'a assortie d'une réserve qui nie la compétence du Comité contre la torture chargé de veiller au respect des engagements.
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