Les avocats Paul Nicoud et Xavier Hofman font remarquer qu'en principe, au regard de la loi, il est impossible de mettre en place légalement la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), préalable à l'entrée en vigueur de la loi Renseignement.

La loi sur le renseignement commence-t-elle par un couac ? C'est ce qu'affirment les avocats Paul Nicoud et Xavier Hofman spécialisés en droit des nouvelles technologies, qui publient sur leur blog LePIscope une analyse des nominations à la nouvelle Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). Alors que le choix de confier sa présidence à Francis Delon est contestable compte tenu de la proximité de ce serviteur de l'Etat avec les milieux militaires et du renseignement, les deux juristes remarquent que les autres membres de la CNCTR ont été nommés avec force précipitation, dans des formes probablement non conformes au droit.

En effet, tant que la nomination de Francis Delon n'est pas officialisée par son approbation formelle par le Parlement, l'essentiel de loi Renseignement est en attente. L'article 26 de la loi dispose en effet qu'à l'exception de quelques dispositions, "la présente loi entre en vigueur au lendemain de la publication au Journal officiel du décret nommant le président de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement". Or l'article L831-1 du code de la sécurité intérieure, qui organise la nomination des membres de la CNCTR, fait partie de ces dispositions qui n'entreront en vigueur qu'après l'officialisation de la présidence de Francis Delon.

IMPOSSIBLES NOMINATIONS ?

Les avocats Paul Nicoud et Xavier Hofman font pourtant remarquer que le vice-président du Conseil d'Etat s'est explicitement appuyé sur l'article L831-1 pour nommer les deux membres qui relèvent de sa compétence (Francis Delon et Jacqueline de Guillenchmidt), tandis que la Cour de cassation s'est gardé publiquement de fonder en droit ses nominations (Franck Terrier et Christine Penichon). "Comment le Conseil d’État et la Cour de cassation peuvent-ils nommer des membres auprès de la CNCTR alors que l’article du Code de la sécurité intérieure qui leur confère ce pouvoir n’est pas encore entré en vigueur ?", demandent les deux juristes.

Mais ce couac est imposé par la loi, qui démontre encore son improvisation due à la volonté du gouvernement de la faire adopter au rouleau compresseur malgré l'opposition très vive qui s'est exprimée dans la société civile. Il est en effet juridiquement impossible de respecter la loi en l'état. En effet, l'article L831-1 qui n'est pas en vigueur est l'article qui organise la nomination du président de la CNCTR, laquelle n'existera que lorsque le texte sera en vigueur, après la nomination du président. C'est le serpent qui se mort la queue. Il aurait fallu que l'article L831-1 fasse partie des articles qui entrent immédiatement en vigueur, mais le législateur ne l'a pas prévu…

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