Les préconisations de l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne, rendues mercredi, sont claires : il faut suspendre le "Safe Harbor", un mécanisme adopté aux débuts des années 2000 et qui vise à simplifier le transfert des données personnelles des citoyens des pays membres de l'Union européenne vers les États-Unis, car celles-ci ne sont pas assez protégées outre-Atlantique.
La recommandation de l'avocat général est évidemment influencée par les révélations survenues en 2013 avec la publication des documents ultra-confidentiels de la NSA décrivant un immense programme de surveillance global des réseaux de communication. Dans un monde post-Snowden, vu l'accès dont disposent les services de renseignement, le principe du Safe Harbor est donc à revoir entièrement.
Sans surprise, l'avis rendu par l'avocat général a vivement déplu au lobby Digital Europe, qui défend les intérêts de nombreux poids lourds de l'informatique au sein des instances de l'Union européenne. À l'inverse, il a ravi les associations comme la Quadrature du Net, qui "salue les conclusions claires et protectrices" rendues par Yves Bot, qui sont "un pas dans la bonne direction".
Il reste désormais à savoir si la Cour de justice de l'Union européenne suivra les préconisations de l'avocat général. Pour la Quadrature, c'est capital : "il lui faut absolument suivre les recommandations de l'avocat général, quand bien même cela imposera de redéfinir très largement le cadre des transferts de données entre l'Europe et les États-Unis".
Mais l'association prévient : la relocalisation des données en Europe ne saurait constituer une réponse adéquate au défi posé par le Safe Harbor. Cela reviendrait à faciliter la surveillance par les services européens. Ce serait un "jeu de dupes", écrit la Quadrature. "Il faut aussi s'assurer que les lois applicables en la matière de ce côté-ci de l'Atlantique soient pleinement respectueuses de la vie privée".
Reste que l'invalidation du Safe Harbor, même si elle était décidée par la Cour de justice de l'Union européenne, n'empêcherait pas des firmes américaines, comme Facebook, de continuer à transférer des données personnelles des citoyens des pays membres de l'Union pour les traiter sur ses serveurs américains, du fait des exceptions déjà en place.
( photo : CC BY-SA Eric Walter )
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