Lorsque l’on parle de piratage, on pense tout de suite au Peer-to-Peer et au partage de fichiers sur Internet, pas forcément aux échanges hors ligne. Et pour cause, copier de la musique de votre ordinateur au baladeur MP3 d’un ami est légal, si on considère néanmoins que cette musique ait été acquise en bonne et due forme. Cela entre dans le cadre de l’exception à la copie privée. Mais cette exception n’est pas admise partout. Elle l’est dans le droit français ou dans le droit américain ; pas dans le droit britannique. Du coup, lorsqu’un organisme se charge d’étudier l’ampleur du piratage, on arrive à des chiffres beaucoup plus alarmants pour l’industrie du disque, puisqu’ils prennent en compte tout un pan de l’échange de musique que nous considérons ici comme légal.

L’étude menée par le lobby British Music Rights sur 1.158 jeunes de 18 à 24 ans montre ainsi que 95 % d’entre eux ont déjà été impliqués dans la copie illégale de musique. Cela va donc de l’usage du Peer-to-Peer à la copie de musique à partir du disque dur d’un ami, en passant par l’enregistrement radio. Il faut dire qu’à l’heure d’Internet, l’exception pour copie privée est une notion difficile à appréhender. Qu’est-ce qu’on y inclut ? Qu’est qu’on en exclut ? Le parti pris de la législation britannique est simplement de la rejeter. Ca a le mérite d’être clair, mais lorsqu’on atteint un taux de 95 % d’hors-la-loi, on est en train de se demander si ce choix ne serait pas un peu hypocrite. On aura rarement vu un type de « criminalité » atteindre de telles proportions, et cela montre encore une fois l’énorme décalage qu’il existe en propriété intellectuelle entre la législation et les usages, particulièrement exacerbé au Royaume-Uni où l’exception pour copie privée n’existe pas.

Ce que voit le BMR dans cette étude, ce n’est pas un argument pour exiger du gouvernement qu’il durcisse sa position. Quand on voit que plus de la moitié des interrogés savent qu’il est illégal (au Royaume-Uni) de copier un CD sur son ordinateur mais qu’ils le font quand même, on peut se demander cela y changerait vraiment quelque chose. Mais il s’en sert plutôt comme occasion de demander au législateur d’introduire la notion d’exception pour copie privée, présente dans la loi européenne et dans la plupart de ses états membres. Pas par sympathie pour l’auditeur, mais plutôt parce qu’elle donne droit là où elle est appliquée à une compensation pour le manque à gagner. Et pourtant, on sait ô combien ce modèle possède aussi ses propres contradictions.

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