En cette période de crise nationale du pouvoir d’achat s’ouvre celle de la chasse aux prix. Il faut tirer sur tout ce qui bouge. Prix des tomates au supermarché, coût du loyer, prix du sans plomb à la pompe… tout est trop cher. Mais il est un poste de dépense qui a véritablement explosé dans les foyers ces dix dernières années sans en avoir l’air : les télécommunications. Non seulement chaque famille doit avoir un abonnement à Internet et un abonnement au téléphone fixe (sauf à être en dégroupage total), mais en plus il faut désormais payer des forfaits de téléphonie mobile pour papa, maman, la grande soeur et le petit frère. Fini, le bon vieux téléphone familial de chez France Télécom. Et peu, pourtant, semblent s’interroger sur le prix des télécommunications, et en particulier sur le prix des SMS.
Nous avons donc pris notre plus jolie calculatrice et notre crayon à papier H2 taillé fin pour comprendre quel était vraiment le prix d’un SMS, entre celui qui est facturé à l’usager et celui qui est payé par l’opérateur pour le relayer. Selon nos calculs, les opérateurs réalisent une marge astronomique de plusieurs milliers de pourcents sur chaque SMS envoyé !
Tout d’abord, il faut comprendre ce que pèse un SMS dans l’infrastructure d’un opérateur. Chaque SMS envoyé est composé d’un maximum de 160 caractères, ce qui peut prendre jusqu’à 140 octets par message. Il faut ensuite y ajouter 27 octets d’informations d’entête du message (numéro du service, numéro de l’expéditeur, type de protocole, format d’encodage, date du SMS, etc.). Soit 167 octets au maximum, pour les messages les plus gros. Total qu’il nous faut multiplier par deux, puisqu’il faut envoyer puis recevoir le message : 334 octets. Arrondissons généreusement à 400 octets par message, puisqu’il y a probablement des frames supplémentaires spécifiques pour la communication.
Un méga-octets de bande passante (1.048.576 octets) peut donc véhiculer au minimum 2621 messages de 160 caractères. En France, le prix de base d’un SMS est facturé par les opérateurs environ 10 centimes d’euros (Orange et Bouygues Télécom proposent un forfait de 30 SMS pour 3 euros par mois, et SFR propose 30 SMS à 2,5 euros par mois). Soit environ 262 euros le méga-octets. A titre de comparaison, la NASA estime que la communication entre la Terre et le télescope spatial Hubble lui coûte environ 11 euros le méga-octets… soit 23 fois moins cher.
Mais allons plus loin. Selon les données fournies par l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes (ARCEP), les Français auraient envoyé au premier trimestre de cette année 6,7 milliards de SMS. Soit une moyenne de 2,23 milliards de textos par mois traités par les trois opérateurs mobiles, ou 833 messages par seconde. Ce qui représente collectivement 851 694 Mo par mois au maximum (rappelons qu’on se base sur l’hypothèse de messages qui font tous 160 caractères), soit un besoin moyen en bande passante de 2603 kilo-bits par seconde, soit 325 ko/s.
A un prix moyen de 10 centimes le SMS, les trois opérateurs télécoms ont gagné environ 223 millions d’euros de chiffre d’affaires par mois grâce aux textos. Mais combien l’envoie de ces messages leur coûte-t-il ?
C’est évidemment un secret jalousement gardé. Mais on peut se faire une idée de leur marge opérationnelle… en comparant ce qui est comparable. Combien est-ce que coûterait pour un particulier une bande passante mensuelle et bidirectionnelle de 325 ko/s par satellite, nécessaire au traitement de 2,23 milliards de SMS ? Pour se faire une idée, il faut aller voir les offres des FAI par satellite. L’un d’eux, Nordnet, propose une formule de connexion par satellite à 2 Mbps, à débit constant tant que l’on ne dépasse pas 1500 Mo dans le mois. Sachant qu’il nous faut 851.694 Mo par mois, il faudrait louer 567 connexions à 69,90 euros par mois pour traiter le même nombre de SMS que les opérateurs télécoms.
Ce qui fait une note de moins de 40.000 euros par mois, contre plus de 200 millions d’euros de chiffre d’affaires engrangés par les opérateurs.
Ce qui ramène le coût du SMS à…. 0,000017 euros l’unité… 5882 fois moins cher.
Forcément, on comprend mieux pourquoi l’arrivée de Free comme quatrième opérateur qui peut bousculer la concurrence fait peur aux trois autres… Ce qu’on ne comprend pas en revanche, c’est pourquoi le gouvernement qui prétend lutter pour le pouvoir d’achat vient de repousser le dossier à 2009.
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