C’était en 2013, quelques semaines tout juste après les toutes premières révélations d’Edward Snowden sur la surveillance électronique de masse mise en place par la NSA, l’agence de renseignement des États-Unis. Le service de messagerie sécurisée Lavabit annonçait brutalement l’arrêt de ses activités. Son fondateur, Ladar Levison, expliquait alors que sa décision avait été motivée par les difficultés croissantes — notamment juridiques — à opérer une telle plateforme.
Dans une sorte de message d’adieu au service, Ladar Levison indiquait qu’il n’était pas en mesure de détailler les raisons l’ayant contraint à fermer sa plateforme, sans risquer lui-même de subir une action en justice du gouvernement américain. « J’aurais aimé pouvoir vous décrire en toute légalité les évènements qui m’ont conduit à prendre cette décision. Mais je ne peux pas le faire ».
« Je crois que vous méritez de savoir ce qui se passe : le premier amendement est supposé me garantir la liberté d’expression dans des cas comme celui-là. Hélas, le congrès a fait passer des lois qui disent le contraire. En l’état actuel des choses, je ne peux pas vous expliquer les évènements des six dernières semaines, même si j’ai à deux reprises procédé aux requêtes appropriées ».
Les plus gros ennuis de Lavabit sont arrivés peu de temps après la conférence de presse d’Edward Snowden à l’aéroport international Cheremetievo à Moscou. Et pour cause, l’intéressé avait invité des activistes et des avocats spécialisés dans les droits de l’homme à prendre contact avec lui via une adresse Lavabit. Évidemment, Washington n’ignorait rien de la teneur des échanges entre le lanceur d’alerte et la presse, dans la zone de transit de l’aéroport.
Mais en réalité, l’action du gouvernement américaine est survenue dès le lendemain de la révélation de l’identité du lanceur d’alerte, qui a eu lieu quelques jours après l’éclatement de l’affaire PRISM. C’est à ce moment-là que le gouvernement américain a commencé à mettre Lavabit sous pression, avec une requête judiciaire demandant à Lavabit de fournir des métadonnées sur un certain client de la plateforme, mais dont l’identité n’était pas connue à l’époque.
Une gaffe du gouvernement
Presque trois ans plus tard, les raisons ayant provoqué la fermeture soudaine de Lavabit viennent de subir un éclaircissement tout à fait inattendu. En effet, une gaffe surprenante des autorités américaines permet aujourd’hui de savoir avec certitude — même si l’on pouvait évidemment s’en douter, au regard du contexte très particulier de l’époque — que c’est bien Edward Snowden qui était l’utilisateur de Lavabit dans le collimateur de Washington.
Wired signale que Ladar Levison, dans sa quête permanente pour apporter toute la lumière sur cette affaire, a maintenu une pression judiciaire sur le gouvernement afin d’obtenir le descellement de certaines pièces du dossier. Certes, la demande qu’il a déposée n’a pas permis de lever l’ordonnance de non-divulgation, mais le tribunal en charge de l’examiner a tout de même permis d’obtenir le feu vert pour diffuser tous les documents, à la condition de censurer certains passages sensibles.
Parmi les informations qui ne devaient pas être indiquées clairement figuraient le nom de l’utilisateur et son adresse e-mail, ainsi que certaines autres informations périphériques, après une requête du gouvernement, au motif que leur divulgation pourrait nuire à son enquête. Mais ce qui devait arriver arriva : un document de 2013 est passé entre les mailles de la censure et a révélé que c’est bien Snowden qui était la cible.
Outre les métadonnées, le gouvernement fédéral a obtenu en juillet 2013 un mandat de perquisition exigeant que Lavabit communique ses clés SSL privées utilisées par son service pour chiffrer le courrier électronique de ses usagers. C’est à ce moment-là que Ladar Levison a pris la décision de fermer son service, à la fois pour protéger Edward Snowden, mais aussi tous les autres membres de la plateforme.
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