C’est ce mardi que le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve rencontre Thomas de Maizière, son homologue allemand. Thème de la réunion ? Le chiffrement. Le premier flic de France entend « lancer une initiative européenne destinée à préparer une initiative plus internationale permettant sur cette question de faire face à ce nouveau défi ». Et pour cela, il lui faut a minima le concours de l’Allemagne.
La volonté de faire jouer le moteur franco-allemand sur cette question a été signifiée à l’issue d’un conseil restreint de défense survenu le 11 août, au cours duquel Bernard Cazeneuve a « insisté sur l’importance que revêt, sur le défi que représente pour la lutte antiterroriste, la question du chiffrement d’un certain nombre de moyens de communication utilisé par les terroristes ».
D’après le ministre, « beaucoup des messages échangés en vue de la commission d’attentats terroristes le sont désormais par des moyens cryptés, ce qui rend difficile le travail des services de renseignement ». Dans l’affaire du meurtre du prêtre de l’église de Saint-Étienne-du-Rouvray, il est apparu que l’un des deux tueurs utilisait régulièrement la messagerie chiffrée Telegram.
Levée de boucliers
C’est dans ce contexte que le conseil national du numérique vient de signer lundi une tribune dans Le Monde. Aussi paraphé par Isabelle Falque-Pierrotin, la présidente de la commission nationale de l’informatique et des libertés, et Gilles Babinet, le représentant de la France auprès de la Commission européenne sur les enjeux de l’économie numérique, le texte met en garde l’exécutif.
Si les objectifs exacts du gouvernement français à l’égard du chiffrement restent encore assez flous pour le moment, les auteurs de la tribune prennent les devants. Ils avertissent qu’une limitation du chiffrement ou une mise en place de portes dérobées (backdoors), deux approches qualifiées de « solutions de facilité », « auraient des conséquences graves et non anticipées ».
Un affaiblissement du chiffrement aurait pour effet d’affaiblir « la sécurité des systèmes d’information dans leur ensemble ». Les failles placées volontairement ne seront pas utilisées uniquement par les forces de l’ordre. Elles seront aussi exploitées par des personnes malveillantes. Un avertissement que l’agence nationale de sécurité des systèmes d’information avait déjà mis en avant.
En outre, « il y a fort à parier que de telles mesures auraient une efficacité toute relative sur l’infime minorité d’utilisateurs ciblés ». Et pour les signataires, « avant d’envisager de se doter de nouveaux instruments législatifs, peut-être serait-il judicieux de s’assurer que les services de sécurité exploitent pleinement les nombreuses possibilités qui leur ont été offertes par le législateur ».
Un risque d’affaiblir la sécurité des systèmes d’information dans leur ensemble
Le chiffrement occupe un rôle central dans bon nombre d’activités sur Internet. Qu’il s’agisse de consulter sa boîte aux lettres, d’ouvrir sa messagerie instantanée, de faire un paiement en ligne, de consulter son compte bancaire ou encore de traiter avec les services de l’administration, cette protection intervient à de nombreuses reprises pour sécuriser les communications et les transactions.
Même si les avis du conseil national du numérique ne sont que consultatifs, c’est-à-dire qu’ils ne s’imposent pas au gouvernement, la formation annonce toutefois la mise en place de travaux dédiés au chiffrement à la rentrée « afin d’apporter à ce débat un éclairage à la hauteur des enjeux », «notamment sur les règles de coopération judiciaire internationale et la généralisation d’une culture du chiffrement ».
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