Deux jours après les révélations concernant Tareck El Aissami, numéro deux du régime chaviste, accusé par les États-Unis d’être impliqué dans un trafic international de drogue, le pouvoir vénézuélien tente de limiter l’accès à l’information de ses concitoyens. Notamment sur ce brûlant dossier de corruption qui fragilise Nicolas Maduro, le président déjà empêtré dans un scandale démocratique.
Censure en direct
Ce mercredi, selon l’AFP et CNN, Caracas a suspendu la diffusion de la version hispanophone de la chaîne d’informations internationales que le pouvoir chaviste juge coupable de « propagande de guerre, basée sur des erreurs ». Le gouvernement vénézuélien lui reproche surtout d’avoir révélé la corruption sévissant au plus haut niveau de l’État. Dans la vidéo ci-dessous, la journaliste Elyangelica Gonzalez a immortalisé l’interruption en direct de la chaîne.
Après les révélations de Washington concernant le rôle de narcotrafiquant d’envergure internationale du vice-président, M. El Aissami, la chaîne a poursuivi son investigation et a ainsi pu affirmer que le trafic de stupéfiant n’était pas le seul abus perpétré par ce haut dirigeant. M. El Aissami, connu pour incarner une ligne chaviste dure, serait également responsable d’un trafic de visas et passeports au Proche Orient. Ce chaviste de toujours, nommé récemment auprès d’un Maduro affaibli, semble incarner un des pires exemples de la bolibuguesia (bourgeoisie bolivarienne).
En effet, après une année d’investigation, les journalistes de la chaîne ont pu découvrir l’ampleur et les rouages d’une corruption dans laquelle le même M. El Aissami est accusé de trafic de passeports et visas vénézuéliens à des Irakiens, dont certains seraient liés à des mouvances terroristes. Le vice-président serait ainsi impliqué dans la vente illégale de plus de 173 passeports à des citoyens irakiens, dont de nombreux membres du Hezbollah, le groupe armé libanais.
« Je veux que CNN quitte le Venezuela »
Le reportage à charge a été diffusé sur la version hispanophone de CNN le 6 février, en citant déjà M. El Aissami alors même que la diplomatie américaine ne l’avait pas encore accusé. Le gouvernement vénézuélien n’a pas à prendre la chaîne pour cible : le ministre des affaires étrangères a annoncé après le reportage que des sanctions seraient prises à l’encontre du média.
Dimanche, malgré les difficultés traversées par son régime corrompu en plein déni de démocratie, M. Maduro restait fidèle au franc-parler hérité de ses mentors chavistes. Il assumait un ton péremptoire durant son émission hebdomadaire sur les médias nationaux en s’écriant : « Je veux que CNN quitte le Venezuela, dehors ! »
Un souhait pris au mot par la Conatel (Commission Nationale des Télécommunications) qui a bloqué sur tous les réseaux du pays la transmission de la chaîne hispanophone. Seule sa grande sœur anglophone reste accessible au Venezuela.
En réponse, CNN a décidé de diffuser gratuitement et librement ses programmes sur YouTube en espagnol. Depuis, le flux est maintenu en direct sur la plateforme vidéo et accessible à tous.
Malgré un accès encore très perfectible à Internet pour les vénézuéliens, ces dernières années sont marquées par un recours fréquent à la liberté, relative, du web latino-américain dans le pays pour organiser des protestations à l’encontre du Président Maduro.
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