Ça sent le roussi pour Nest, l’entreprise de domotique spécialisée dans les thermostats et les détecteurs de fumée connectés. Achetée par Google en janvier 2014 pour la somme de 3,2 milliards de dollars, Nest était perçue à l’époque comme une acquisition stratégique pour le géant de la recherche en ligne, qui devait se positionner sur le secteur de l’Internet des objets, face à un Apple toujours plus agressif dans ce domaine.
Le cas de Revolv
La dernière polémique en date suit de très près les révélations étonnantes de The Information, qui détaillait les mauvaises conditions de travail au sein de l’entreprise. Celles-ci ont entraîné le départ d’une grande partie des employés de Dropcam, une filiale achetée par Google en juin 2014 et intégrée à Nest Labs. En cause, Tony Fadell, le célèbre designer derrière l’iPod, fondateur et actuel CEO de Nest, décrit par ses employés comme un véritable tyran qui n’hésite pas à rabaisser publiquement ses collaborateurs.
Cette fois, l’entreprise se retrouve encore sous le feu des projecteurs à cause d’une de ses filiales, Revolv. Cette dernière est une société américaine rachetée par Google en octobre 2014 au travers de Nest, qui fabriquait un hub domotique capable d’établir des liaisons entre différents appareils connectés.
Dans une annonce passée inaperçue en février, Tim Enwall et Mike Soucie, les fondateurs de la start-up, avaient prévenu que les hubs arrêteront tout simplement de fonctionner à partir du 15 mai, sans autre forme de procès. Et comme on pouvait s’en douter, la pilule est passée avec difficulté auprès des utilisateurs du produit, qui vont se retrouver avec un boîtier à 300 dollars complètement inutilisable.
D’après les fondateurs de la firme, cet arrêt est dû à l’intégration de leur technologie au sein de « Works with Nest », un programme similaire à Apple Home Kit qui permet aux constructeurs tiers de rendre leurs appareils compatibles avec l’écosystème de Nest. « Hélas, cela veut dire que nous ne pouvons plus allouer des ressources à Revolv et nous devons fermer le service », explique l’entreprise.
La question de la longévité du matériel
Le boîtier domotique de Revolv a été retiré de la vente en octobre 2014, et on ne sait pas combien de personnes utilisent encore ce produit. Mais la décision de Nest soulève cependant une question importante relative à l’Internet des objets. Ainsi, comme le souligne Arlo Gilbert, un entrepreneur et possesseur mécontent de Revolv, on peut se demander si « l’Internet des objets n’annonce pas la fin du concept de propriété ? Achetons-nous juste du matériel éphémère de manière intentionnelle » ?
Plus loin, il explique que « son éclairage extérieur cessera de s’allumer et de s’éteindre automatiquement, ses lumières de sécurité ne réagiront plus aux mouvements, son système d’alarme maison ne fonctionnera plus ». Par extension, on peut aller jusqu’à se demander si un appareil de santé ou même une tondeuse connectée pourrait, du jour au lendemain, arrêter de fonctionner parce qu’une entreprise décide de fermer ses serveurs.
Au lieu de développer des systèmes ouverts et libres, les géants du web préfèrent enfermer les constructeurs tiers et les utilisateurs au sein d’écosystèmes propriétaires. Ils dépendent ainsi de facto du bon vouloir de ces sociétés qui peuvent décider à tout moment d’arrêter leurs services. Cette pratique cache en fait le véritable enjeu des objets connecté, qui, sous prétexte de faciliter la vie des usagers, sont un moyen supplémentaire d’agréger des données.
Compensation financière
Face au torrent de critiques, Nest aurait pu décider de libérer le code source de son matériel afin qu’il puisse être maintenu par la communauté. À la place, le groupe invite les personnes intéressées à la contacter (à l’adresse [email protected]) afin de bénéficier d’une compensation financière, attribuée au cas par cas. On ignore pour l’instant si le produit sera remboursé intégralement, ou au prorata de la date d’achat.
Nest n’est pas encore au bout de ses peines. D’après Re/Code, l’entreprise pourrait faire face à une nouvelle vague de départs d’ici quelques mois, après l’expiration d’un contrat qui empêche les talents de s’en aller. D’après le site, de nombreux responsables pourraient quitter le navire, suivant ainsi les pas de Greg Duffy, le fondateur de Dropcam parti en janvier 2015, et de deux responsables de Nest qui ont fait leur valise la semaine dernière, et dont l’un était l’ingénieur en chef en charge du matériel.
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