Même s’il modifie le code de la propriété intellectuelle pour préciser que « les opérateurs sont tenus d’adresser par voie électronique à l’abonné chacune des recommandations » prévues par la loi Hadopi, le décret publié mercredi contre Free ressemble davantage à un contre-feu médiatique qu’à une réelle pression juridique. Car même à considérer que le décret est légal, ce qui est encore douteux, il reste actuellement inapplicable.
On se souvient en effet que pour justifier son refus d’envoyer les e-mails, Free avait expliqué qu’il avait proposé au ministère de la Culture « un conventionnement » qui n’a pas été signé, et qui aurait permis « d’encadrer les échanges portant sur des données personnelles au sujet desquelles la CNIL porte une attention particulière« . L’Hadopi nous avait alors répondu qu’elle ne voyait pas de quelle convention parlait l’opérateur, en affirmant que celle prévue par le décret du 5 mars 2010 sur l’interconnexion des fichiers de l’Hadopi et des FAI était étrangère à l’envoi des mails.
Pourtant, selon nos informations de source très fiable, c’est bien la convention sur l’interconnexion qui règle aussi les modalités de l’envoi des e-mails. Mais elle n’a toujours pas été signée, et le ministère de la Culture n’a pas usé de l’arme atomique offerte par le décret. Il prévoit en effet qu’à défaut de signature d’une convention entre l’Hadopi et les FAI, la rue de Valois et le ministère de l’Industrie peuvent publier un arrêté conjoint pour définir les modalités de l’interconnexion. Mais elles perdraient alors leur caractère confidentiel, et surtout le gouvernement abandonnerait une carte importante dans les négociations plus larges que Frédéric Mitterrand entend mener avec les opérateurs.
En principe, tant que la convention n’a pas été signée ou que l’arrêté n’a pas été publié, l’envoi des mails est toujours bloqué. Le décret publié aujourd’hui vise lui-même l’interconnexion qui n’a pas encore été encadrée dans les formes légales.
Paradoxalement, le seul effet concret de la publication du décret pourrait être de retarder encore les négociations. En effet, alors qu’il impose désormais que le FAI « adresse » lui-même les recommandations, les pourparlers techniques entre l’Hadopi et les FAI reposaient sur le texte de la loi, qui se contente de faire du FAI un intermédiaire. Selon nos sources, l’accord en cours de négociation prévoyait simplement que chaque opérateur mette à la disposition de la Haute Autorité un serveur SMTP sécurisé permettant à l’Hadopi d’envoyer elle-même ses avertissements, avec comme seule obligation pour le FAI de veiller à ce que les mails ne soient pas bloqués par des mesures de contrôle interne, notamment anti-spam. Or si c’est désormais à l’opérateur lui-même d’adresser les mails, l’opération change de nature.
A suivre.
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