Une entreprise commerciale n’est pas une œuvre de bienfaisance qui pense au bien commun avant son propre intérêt, et Ed Rensi est là pour nous le rappeler. L’ancien patron de McDonald’s, qui fut président de l’entreprise de hamburgers jusqu’en 1999, a en effet prévenu sur Fox Business que les fast food n’hésiteraient pas à acheter des robots pour remplacer ses « cuisiniers », si la convention collective du secteur imposait un smic à 15 dollars de l’heure, comme l’exigent les syndicats.
« J’étais au National Restaurant Show hier, et si vous regardez les appareils robotisés qui arrivent dans l’industrie de la restauration… C’est moins cher d’acheter un bras robotisé à 35 000 dollars que d’employer un salarié qui n’est pas efficace pour mettre des frites dans des cornets à 15 dollars de l’heure », assure celui qui a monté une nouvelle chaîne de restaurants, Tom & Eddie’s. « C’est un non-sens et c’est très destructeur et c’est inflationniste, et ça va causer des pertes d’emplois à travers tout le pays comme vous n’imaginez pas ».
Plus vous pousserez pour augmenter les salaires, plus ça ira vite
Pour Ed Rensi, la robotisation menace tous les salariés dont le travail peut être efficacement remplacé par une machine, qui ne se fatigue jamais, ne commet pas d’erreur, et n’est pas soumise à la moindre régulation du droit du travail. « Si vous ne pouvez pas payer les gens un salaire raisonnable, vous allez demander aux machines de faire le travail. C’est juste du bon sens. Cela va se produire, que ça vous plaise ou non. Et plus vous pousserez [pour des augmentations de salaire], plus ça ira vite ».
Le chantage à la robotisation n’est pas nouveau pour les fast foods. En 2013, l’Employment Policies Institute, un lobby libéral privé qui défend l’idée que les salaires minimum sont générateurs de chômage, s’était offert une pleine page de publicité dans le Wall Street Journal pour mettre en garde contre le grand-remplacement par les robots.
Une entreprise américaine, Momentum Machines, travaille depuis 2009 sur l’automatisation des cuisines de restaurants.
En 2015, une fausse rumeur avait également circulé, qui parlait d’un restaurant McDonald’s pilote entièrement automatisé, à Phoenix dans l’Arizona. Cette rumeur était apparue alors que déjà, le Washington Post avait affirmé que la chaîne de fast foods envisageait d’automatiser ses chaînes de production de burgers, où tout est extrêmement calibré. Tout ne pourrait sans doute pas être automatisé, mais le nombre de salariés nécessaires pour encadrer les robots pourrait être largement plus faible que le nombre d’employés nécessaires pour faire un menu Big Mac aujourd’hui.
Quelle économie dans un monde de robots ?
Les propos d’Ed Rensi, à qui on ne peut reprocher qu’un cynisme réaliste, démontrent en tout cas à nouveau la nécessité d’imaginer une nouvelle répartition des richesses dans les sociétés modernes. Si le chômage augmente fortement par la robotisation, ou si ne peuvent être créés que des travailleurs pauvres qui sont mis en concurrence avec des robots de moins en moins chers et de plus en plus efficaces, l’État devra nécessairement venir de substituer au privé par des prestations sociales augmentées, qu’il faudra bien financer par un impôt sur les robots.
C’est parce qu’actuellement un robot qui remplace un humain ne paye pas les cotisations sociales payées par cet humain et par son employeur que le système apparaît de plus en plus déséquilibré.
La question sociétale qui vient est celle de la pertinence de la taxation des robots. Faut-il les taxer au risque de freiner la révolution technologique, pour que les gains de productivité profitent davantage à la collectivité ? Ou faut-il continuer à laisser les gains de productivité prospérer, en espérant qu’ils débouchent rapidement sur de nouvelles créations d’emplois qui, eux, ne seraient pas remplaçables à court terme ?
De plus en plus, les progrès technologiques, que ce soit de robotisation ou d’intelligence artificielle, rendent cette dernière option irréaliste.
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