Les maisons de disques sont peut-être en passe de remporter le combat législatif qu’elles mènent en Europe pour faire allonger la durée de protection des enregistrements. La mesure adoptée en 2009 par le Parlement Européen, bloquée au niveau du Conseil, pourrait revenir sur la table sous l’effet d’un revirement inattendu.

Il y a deux ans presque jour pour jour, le Parlement européen adoptait une proposition de la Commission Européenne d’étendre la durée de protection des droits voisins. Grâce à ce texte, les maisons de disques continueraient à avoir la propriété exclusive des enregistrements musicaux pendant 70 ans, au lieu de 50 ans actuellement. Mais la proposition votée par le Parlement, après la négociation d’un compromis avec la Commission Européenne qui souhaitait 95 ans de protection, est restée au bloquée au niveau du Conseil européen.

Plusieurs états membres, en particulier du nord et de l’est de l’Europe, faisaient obstacle à l’adoption définitive du texte. Cependant, le ministère de la Culture danois a fait savoir qu’il avait changé d’avis, et qu’il soutenait désormais la proposition parlementaire, selon le blog Wolters Kluwer. « Puisque le Danemark faisait partie d’une fragile minorité de blocage au Conseil Européen, il existe un risque désormais que la Présidence de l’Union Européenne (la Hongrie) essaye de faire adopter la proposition dans les semaines à venir« , s’inquiète-t-il.

L’enjeu pour les maisons de disques est de conserver des droits et donc des royalties sur les enregistrements vieux de près de 50 ans, qui passeront bientôt dans le domaine public. En particulier des enregistrements des Beatles ou des Rolling Stones, qui continuent à leur rapporter beaucoup d’argent, ou ceux de Johnny Hallyday en France. Certains de ses plus gros succès comme Retiens la nuit, Salut les copains, ou l’Idole des jeunes ont été enregistrés au tout début des années 1960. S’ils restent couverts par les droits d’auteur, qui n’expirent que 70 ans après la mort des auteurs des paroles et des mélodies, les disques produits depuis plus d’un demi siècle ne rapportent plus rien à leurs producteurs ou leurs interprètes. Ce qui est logique et normal.

Le but initial du droit d’auteur et des droits voisins n’était pas d’assurer une rente à vie aux auteurs et aux producteurs via leurs œuvres à succès, mais de leur assurer une exploitation exclusive temporaire, pendant laquelle les créateurs pourraient travailler sur les prochaines œuvres qui assureront leurs nouveaux revenus. C’est un mécanisme censé encourager la production de nouvelles œuvres.

Le fait d’étendre la durée de protection des droits voisins ne répond à aucune logique culturelle ou économique. Un rapport commandé par la Grande-Bretagne en 2006 avait démontré que le fait d’augmenter la durée de protection des droits voisins aurait pour effet d’augmenter le prix d’accès aux œuvres, et d’avantager les majors qui ont les fonds de catalogue les plus importants. En matière de droit d’auteur, il avait été calculé que la durée optimale de protection des droits serait de 14 ans après la création de l’œuvre, alors qu’elle est aujourd’hui plus plutôt autour des 150 ans.

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