Jusqu’à l’introduction des Instagram Stories, Snapchat et Instagram menaient une compétition à peu près cordiale dans le cœur de la jeunesse connectée. Mais depuis l’annonce d’Instagram d’intégrer, ni plus ni moins, le fonctionnement de Snapchat dans son application, la guerre semble cette fois déclarée.
Facebook, qui avait essayé d’acheter Snapchat il y a quelques années, utilise désormais sa filiale achetée 1 milliard de dollars pour déstabiliser le business d’Evan Spiegel, le fondateur de l’application aux photos éphémères.
Instagram n’a pas à se soucier de la concurrence que peut lui faire Snapchat, qui n’est fréquenté quotidiennement que par 150 millions d’usagers. De son côté, avec plus de 500 millions d’utilisateurs, Instagram se place toujours comme l’un des réseaux sociaux les plus fréquentés au monde, et prouve que Facebook a eu raison en l’achetant. D’autant que sa monétisation s’avère très rentable et que l’application s’est clairement installée dans les mœurs. En 2016, Instagram a fêté le doublement en deux ans sa base d’utilisateurs, rien que ça.
Dans les faits, l’application de retouches photographiques est clairement parvenue à se hisser comme un incontournable de la vie sociale en ligne pour de nombreux internautes, et comme une plateforme de choix pour les publicitaires. En permettant d’afficher une publicité ciblée incluse dans le fil d’actualité, la plateforme leur permet de créer des campagnes à moindre coût tout en ayant la garantie de cibler la bonne personne.
De son côté, Snapchat possède des arguments pour remettre en question le modèle d’Instagram. Or avec la sortie des Instagram Stories, le service fondé par Evan Spiegel se fait attaquer sur ses propres terres, ce qui augure un affrontement plus dur entre les deux réseaux sociaux dans les semaines et les mois à venir.
Les deux services s’adressant à la très convoitée audience des millennials et ayant un profil maintenant très similaire, se pose la question du choix à venir des utilisateurs : à quoi bon rester sur deux plateformes qui proposent des fonctionnalités relativement proches ? Dans ces conditions, l’une d’elles est menacée : la bataille de l’attention, qui consiste à pousser un internaute à rester le plus longtemps sur une plateforme donnée, risque de redoubler en intensité.
Instagram et Snapchat en data
Pour bien saisir les enjeux qui traversent les deux entreprises, il faut se reporter à leurs chiffres ainsi qu’à l’évolution de ceux-ci. Instagram, pour commencer, a atteint en 2016 un taux de pénétration exceptionnel, avec plus d’un tiers des possesseurs de smartphones ayant ouvert un compte.
Mécaniquement, ce haut taux affaiblit ses perspectives à venir puisque le nombre d’usagers qui peut être capté par la suite se réduit. En revanche, l’application conserve une bonne forme en comparaison de Facebook, selon eMarketer, principalement du fait que Instagram peut encore modifier sa présence dans la pyramide des âges en touchant un public plus âgé.
Comme le montre le rapport ComScore de 2015, la répartition des profils d’âge est mieux répartie chez Instagram, qui a finalement une audience assez hétérogène par rapport à Snapchat.
À ce titre, Snapchat est plus avantagé pour sa croissance, car s’il ne possède pas encore la base d’utilisateurs d’Instagram, les perspectives de vieillissement du réseau sont possibles, notamment sur les tranches 25-34 ans, et également au-delà, avec les plus de 35 ans.
Dernière difficulté pour Instagram, le temps que ses utilisateurs lui consacrent. Le site est moins interactif que Snapchat : la filiale de Facebook est en moyenne moins fréquentée en temps que sa rivale. Évidemment, l’introduction de fonctionnalités à-la-Snapchat dans l’expérience utilisateur du réseau est aussi une tentative pour bousculer cet état de fait qui, à la longue, pourrait pénaliser Instagram et détourner ses annonceurs.
Enfin, le dernier point qui différencie aujourd’hui radicalement Snapchat et Instagram est la vision de la publicité. Pour Evan Spiegel et Snapchat, le native advertisement est l’avenir et tout le business model de l’application est fondé dessus. Les technologies pour le développer et le rendre toujours plus ingénieux sont en permanence au cœur des préoccupations de Snapchat.
Instagram a une démarche bien plus classique mais également plus accessible pour les annonceurs, avec des traditionnels bandeaux publicitaires au même format carré que les photos circulant sur le réseau social qui se fondent plus ou moins dans les fils d’actualité des utilisateurs.
Avec l’arrivée des Instagram Stories, le réseau social risque de déplacer son audience du fil d’actualité vers l’interface — identique à celle de Snapchat — des stories, qui pour le moment ne sont pas monétisées. Il faudra donc attendre pour observer l’évolution des usages, et en fin de compte vérifier deux pistes : la première est que Facebook n’est plus en capacité de tuer Snapchat, et la seconde que la native advertisement interactif est l’avenir de la publicité mobile.
Rendez-vous à la fin du match à la conquête du millennial pour connaître la validité de ces deux hypothèses.
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