Margrethe Vestager, commissaire européenne en charge de la concurrence, souhaite que les entreprises adoptent la protection de la vie privée dès la conception de leur produit (du « privacy by design ») pour attirer et conserver la confiance des utilisateurs, notamment contre les mastodontes américaines.

L’avenir technologique est-il nécessairement dans l’abandon de sa vie privée, pour profiter de nouvelles fonctionnalités dont les utilisateurs ressentiraient le besoin ? Alors que Google vient de déployer sa messagerie Allo en expliquant qu’il doit copier par défaut tous les messages échangés pour assurer le fonctionnement de ses services d’intelligence artificielle actuels ou futurs, la commissaire européenne à la concurrence, Margrethe Vestager, veut voir les choses autrement.

« Je suis une économiste, donc je sais que les repas gratuits ça n’est pas quelque chose qui existe », confie-t-elle dans un podcast à Recode. « Vous payez avec une monnaie ou une autre, que ce soit des centimes, ou que vous payiez avec vos données, ou que vous payiez avec les publicités que vous acceptez. Et je pense que les gens deviennent de plus en plus conscients du fait que leurs données personnelles ont de la valeur ».

Que la vie privée ne soit pas juste un add-on, mais qu’elle soit vraiment à la base

« Ce que nous voyons en Europe c’est qu’il y a une grande proportion de citoyens qui trouvent qu’ils n’ont pas le contrôle. Ils ne font pas confiance dans les entreprises pour protéger leurs données, et je pense que c’est néfaste, parce qu’il y a alors un risque qu’ils se retirent de tous les bénéfices de notre économie numérique. Et pour construire la
confiance, je pense qu’il est très important que nous fassions respecter les règles de protection de la vie privée, que nous ayons le ” privacy by design” dans de nouveaux services, pour que la vie privée ne soit pas juste un add-on, mais qu’elle soit vraiment à la base
».

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Les services de Mme Vestager n’ont pas directement compétence en matière de vie privée, mais ses déclarations peuvent éclairer certaines de ses actions, notamment contre les abus de position dominante de Google (avec en plus une procédure contre Android). Alors qu’il est très difficile pour une entreprise européenne de chercher à rivaliser sur le plan technologique pur avec des Facebook, Twitter, Google ou Microsoft qui disposent de quantités insondables de données personnelles à exploiter pour personnaliser leurs services, la protection des données personnelles est un atout sur lequel peuvent surfer de nouveaux acteurs européens. Reculer sur la protection des données personnelles, comme la Commission européenne est accusée de le faire avec le Privacy Shield, c’est abaisser les barrières à l’entrée du marché européen, et renoncer à donner un levier aux entreprises européennes.

Où sont les startups « private by design » ?

Dans les faits néanmoins, rares sont encore les startups européennes à cultiver véritablement l’image ce « privacy by design » pour attirer la confiance des utilisateurs. On peut citer Cozy qui propose un serveur et assistant personnel « dans le plus total respect de votre vie privée, puisque vos données sont stockées dans un espace que vous contrôlez », l’entreprise allemande Nextcloud qui propose des serveurs personnels (créée par le fondateur d’OwnCloud), ou encore le moteur de recherche européen Qwant qui met en avant l’absence de traçage de ses utilisateurs. Ajoutons le service d’intelligence artificielle Snips, créés par des Français et qui dispose de bureaux à Paris (93 % de sa main d’œuvre) et à New York.

On pourrait également parler de Telegram qui déclare avoir son siège à Berlin, mais sa situation réelle est des plus floues. Quant à Protonmail qui fournit des e-mails sécurisés, il est Suisse et donc hors de l’Union européenne.

Paradoxalement, ce sont encore les Américains qui semblent prendre de l’avance sur le privacy by design, avec l’offensive menée par Apple pour en faire un argument de vente contre l’écosystème Android, ou le moteur de recherche DuckDuckGo.

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