Les résultats sont moins pire que ceux attendus par les analystes, ce qui est une victoire en soi. Mais Apple connaît bien, pour la première fois depuis 2001, une petite crise. La firme de Cupertino a présenté mardi ses résultats trimestriels, qui marquent le troisième trimestre consécutif en baisse. Son chiffre d’affaires pour l’année fiscale échue le 24 septembre a baissé de 8 %, à 233,7 milliards de dollars, et son bénéfice a reculé de 14 % à 45,7 milliards de dollars (tout de même).
Depuis quinze ans, jamais Apple n’avait vu ses ventes baisser d’une année sur l’autre. La firme créée par Steve Jobs et Steve Wozniak, qui a ressuscité d’une quasi-faillite en 1997, n’avait connu que la croissance depuis le lancement des premiers iPod auxquels ont succédé les iPhone, le tout accompagné par une gamme solide d’ordinateurs Mac et Macbook qui ont bénéficié d’une image de marque sans égale. Mais les iPod sont devenus très marginaux (ils ne sont même plus affichés dans le menu principal du site officiel d’Apple), les ventes d’ordinateurs sont en baisse partout dans le monde, les iPad n’ont eu qu’un succès éphémère, et les iPhone qui ont totalement changé le statut d’Apple arrivent en fin de cycle.
La question désormais que se posent les investisseurs est de savoir si la baisse subie cette année par Apple est une simple anomalie sur une courbe qui continuera à monter au cours des prochains exercices, ou s’il s’agit du début d’un repli durable. Apple a connu des années fastes en révolutionnant l’approche marketing de certains produits, et en paraissant innover sans cesse, mais la firme semble ensuite avoir laissé la concurrence rattrapé son retard technologique et commercial. Lorsqu’elle prend des risques, comme l’abandon du jack 3.5, c’est davantage sur des évolutions technologiques que sur de véritables nouveaux usages. Et que dire de la Watch, que tout le monde ou presque a déjà oubliée.
Transition, ou décroissance durable ?
Néanmoins le tableau n’est pas tout noir pour la firme de Cupertino. Elle a encore écoulé 45,51 millions d’iPhone au cours des trois mois au 24 septembre (contre 48 millions à la même période l’an dernier), ce qui est légèrement supérieur à la moyenne des prévisions qui tablaient plutôt sur 44,8 millions d’unités. Globalement les résultats affichés par Apple sont un peu au dessus des attentes, ce qui évite tout mouvement de panique en bourse. Dans les cotations avant-ouverture, le titre côté au Nasdaq affiche tout de même une baisse de près de 4 % ce mercredi matin :
Mais ce qui crée les doutes, c’est justement cette dépendance encore très forte au téléphone mobile. Apple semble avoir de la peine à étendre sa gamme avec de nouveaux produits à fort potentiel. Or à force de se mettre en position d’attente (par exemple sur la réalité virtuelle), ou de tarder à entrer de plein pieds sur certains marchés (par exemple sur l’intelligence artificielle ou la domotique), Apple pourrait mettre à mal l’image d’innovateur qu’il avait construite, et laisser ses concurrents comme Google, Amazon ou Samsung emporter la mise.
Questionné lors d’une conférence téléphonique sur sa vision de l’évolution de la gamme de produits Apple dans les prochaines années, Tim Cook aurait paru irrité, selon Business Insider. Moins par la question elle-même que par les relances des investisseurs qui semblent désormais douter de la sincérité d’une réponse traditionnelle (« Nous avons la plus forte [roadmap] que nous ayons jamais eu et nous sommes vraiment confiants sur les choses qui s’y trouvent »).
On sait néanmoins — ou l’on présume fortement — que cette année n’était qu’une année de temporisation pour Apple, qui a préféré sortir une petite évolution de son iPhone avec l’iPhone 7, avant de réserver le gros lot des innovations pour le prochain iPhone (dont on murmure qu’il pourrait s’appeler « iPhone 10 » pour marquer le saut). Depuis plusieurs années déjà, Tim Cook prévient aussi qu’Apple travaille sur une toute nouvelle gamme qui viendra étendre ses ventes sur des marchés où la firme est actuellement absente ou peu présente. On pense bien sûr à la domotique, la télévision, ou l’automobile.
Avec plus de 150 milliards de dollars en banque, Apple peut aussi miser sur la croissance externe à tout moment, ou relancer ses efforts marketing s’ils devenaient nécessaires. L’avenir n’est certainement pas sombre pour la firme de Cupertino. Mais il paraît aujourd’hui bien moins radieux qu’il l’était il y a quelques années.
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