Free s’est associée à une jeune start-up pour lancer la société FrNIC, qui ambitionne de remplacer l’association AFNIC pour la gestion des noms de domaine français. Explications.

Ce ne devait être qu’une formalité pour l’AFNIC. Lorsque le gouvernement a lancé le mois dernier son appel à candidatures pour la gestion des noms de domaines français, il semblait acquis que l’association créée par l’INRIA en 1998 pour gérer le .fr serait désignée à l’issue de la procédure. Comme toujours. Mais c’était sans compter sur Free, qui entend jouer les trouble-fêtes et déposer une candidature dissidente.

La Fondation d’entreprise Free s’est en effet associée à une toute jeune start-up, Starting Dot, pour monter ensemble le dossier « Le-Nouveau.fr« , porté par une société conjointe appelée FrNIC. Ensemble, ils espèrent détrôner l’AFNIC et obtenir la gestion de l’ensemble des noms de domaine français, que ce soient les .fr qui constituent la majeure partie, ou les domaines locaux comme les .re (Ile de la Réunion), .gp (Guadeloupe), .mq (Martinique), .gf (Guyane), etc.

A l’origine du projet se trouve Starting Dot, une société montée spécialement pour répondre à l’appel à candidatures de l’ICANN sur les nouveaux noms de domaine de premier niveau (« new gTLD »). Après avoir levé 1,5 millions d’euros, Starting Dot s’est portée candidate pour gérer cinq nouveaux domaines, dont un .archi. A chaque fois, le dossier est porté avec une même philosophie de co-gestion avec des entreprises concernées par la gestion de « leur » TLD. Par exemple, le .archi est développé en exclusivité avec l’Union Internationale des Architectes.

Guillaume Buffet, professionnel du marketing co-fondateur de Starting Dot et co-président du think tank Renaissance Numérique, nous explique que le .fr serait géré avec le même principe de « gestion collective ». Alors que l’AFNIC est une association, FrNIC sera une entreprise privée à but lucratif, dont le capital sera divisé en trois tiers :

  • Un tiers pour les deux fondateurs (la Fondation d’entreprise Free et Starting Dot) ;
  • Un tiers pour 30 associations impliquées dans le web français ;
  • Un tiers pour 30 entreprises du secteurs, en particulier des registrars qui vendent les .fr.

Les critères de choix pour sélectionner un actionnaire plutôt qu’un autre ne sont pas déterminés.

Les profits seront ensuite répartis aux actionnaires, avec 10 % bloqués au profit de la Fondation de France, pour financer des « travaux de recherche et de développement sur la visibilité du web français« , dirigés par « 12 chercheurs qui sont référents en France« .

Dans le projet, la Fondation d’entreprise Free apporterait son expertise technique, qui est déterminante pour la viabilité de la candidature. Il faut en effet rivaliser avec l’AFNIC qui a hérité du savoir-faire de l’INRIA, et sera difficile à concurrencer sur ce point. Guillaume Buffet se veut rassurant, en rappelant qu’outre la compétence technique de Free, le président de la Fondation, Jean-Claude Michot, est l’ancien directeur de Gandi, le premier registrar de France. Et il assure par ailleurs que le dossier demandé par l’ICANN à Starting Dot est encore beaucoup plus exigeant sur les critères techniques.

Reste à comprendre pourquoi une telle candidature dissidente a-t-elle vu le jour. Sur ce point, Guillaume Buffet explique qu’il croit davantage dans la gestion collective par les acteurs industriels que dans la gestion par une association à la philosophie très administrative pour dynamiser le .fr, qui selon lui souffre d’une désaffection.

Il constate qu’il n’existe que 35 .fr pour 1000 habitants, contre 200 en Allemagne, ou 300 en Hollande. Selon ses calculs, la France se classerait 20ème sur 22 dans la liste des pays d’Europe occidentale. Or il voit dans ce manque d’adoption du .fr un critère « symptomatique du retard de la France en matière de numérique« .

FrNIC ne serait qu’un catalyseur pour inciter davantage les acteurs français à se prendre en main pour donner plus de vie au web français.

En réaction, l’AFNIC a lancé son site internet « Je soutiens AFNIC« , pour défendre sa candidature. Parmi ses atouts, il cite « une gouvernance ouverte à toutes les parties prenantes, transparente et sans discrimination« , « la prise en compte des notions de bien public et d’intérêt général« , et le « maintien de tarifs orientés sur les coûts« .

L’appel d’offres reste ouvert jusqu’au 11 mai. En principe, le candidat retenu devrait être désigné au plus tard le 30 juin 2012.

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