Alexis Bonillo coche toutes les cases du profil d’entrepreneur tout droit sorti d’école de commerce : poli, souriant, un rien arrogant et double champion de France de saut à la perche. Ça n’a peut-être aucune importance, mais le garçon voltige plus haut que vous et moi : sky is the limit.
En plus, il complète son angélique sourire d’une histoire de startup aux faux airs de buddy-movie comme on les aime : « L’histoire a commencé avec un bon ami, Antoine Martin, qui est aujourd’hui mon associé. On s’est dit que ça pouvait être sympa de monter une startup tous les deux. »
Sympa ? C’est un euphémisme pour une startup revendue, selon TechCrunch, à au moins 250 millions de dollars à Evan Spiegel, fondateur de Snapchat. Les startups, c’est un peu comme le saut à la perche : l’important c’est de trouver l’élan, de monter très haut, et d’attendre qu’un gros tapis bien moelleux amortisse votre chute. Vous comprendrez qu’ici, le gros coussin, c’est le pactole.
Une appli pour parents ?
Pourtant tout n’a pas si bien commencé pour les deux têtes fraichement diplômées. Avant d’en arriver à ce jour où le seul réseau social en mesure d’inquiéter Zuckerberg décide de miser gros sur leur boîte, Bonillo et Martin ont répété quelques dizaines de sauts avant de passer par dessus la barre.
En 2011, explique Alexis Bonillo sur Europe 1, les deux copains imaginent une sorte de pisteur pour ados rebelles à l’usage des parents excédés : « Notre vision était de permettre de partager sa position en continu avec ses proches. On a fait une étude de marché en 2011, et on s’est rendu compte que les gens n’étaient pas prêts à faire du partage de position en continu. »
Surprenant, non ? L’entrepreneur finira par regretter : « On s’est donc raccrochés aux branches de ce qui était acceptable à l’époque, c’est-à-dire la famille et la sécurité. »
Devenir l’ami des parents à l’encontre des ados, ce n’est pas vraiment le credo de la Silicon Valley, et c’est également loin d’être la meilleure solution pour peser dans le monde des applis.
Après tout, le consommateur adolescent est plus actif, plus rentable et plus à l’aise avec les technologies de pointe comme la géolocalisation. Oubliant leurs profils de gendres idéaux, nos deux potes reprennent la main sur une application trop lourde et qui a besoin d’une direction. Deux années s’écoulent, durant lesquelles les deux Français bossent dans l’ombre sur leur technologie qui s’améliore manifestement de jour en jour.
« Salut, c’est Alexis et Antoine, on vient de lever 20 millions en 20 jours »
Zenly naît enfin. Fini les parents, fini la sécurité : maintenant, c’est la cour de récré qui fait rêver Bonillo et Martin. Et là, boum, deux millions d’utilisateurs, Bonillo a fléchi sa perche, son concept est moins rigide, plus léger et surtout plus amusant : l’appli décolle.
Romain Dillet, ambassadeur de la French tech pour TechCrunch raconte alors l’histoire de cette app « qui a rendu de nouveau cool la géolocalisation ». Les comparaisons avec Snapchat commencent, le meilleur reste à venir.
Il faut dire que la supériorité technologique des Français est réelle dans un domaine où les performances comptent. Dans la Foire aux Questions de la société, on peut ainsi lire : « Plusieurs milliers d’heures ont été nécessaires pour optimiser l’impact sur la batterie des téléphones. Nos algorithmes brevetés ont été écrit par quelques-uns des meilleurs ingénieurs au monde. Ils continuent quotidiennement de les améliorer. »
Et si Zenly n’est pas sans conséquence pour les batteries, il est bien plus léger que ses concurrents qui peinent à exister.
La route vers le rachat est désormais ouverte. C’est en mai 2017 qu’il interviendra finalement alors que les deux entrepreneurs avouent régulièrement être courtisés « par les grands ». Depuis que l’on comptait 4 millions de téléchargement de l’application, le ciel s’était dégagé et l’on parlait même d’une croissance forte en Asie.
Les levées de fonds se succédaient et Martin avait même fait une apparition remarquée au Disrupt de Londres.
Et puis soudain, c’est le drame pour les utilisateurs de Zenly. Ce mercredi 21 juin, Snapchat dévoile une Snap Map qui ressemble traits pour traits à notre bébé français. Le téméraire réseau social de Spiegel aurait-il copié ? Finalement, on découvre, soulagé, que non. Bonillo et Martin sont retombés sur le tapis.
Spiegel aurait mis sur la table entre 250 et 350 millions d’euros pour acquérir Zenly tout en promettant de ne pas fermer l’application, privilégiant son développement à part, à l’instar de ce que fait Facebook avec Instagram.
Le deal est beau, les Français ont dit oui : leur technologie vient d’être déployée auprès des 160 millions d’utilisateurs quotidien de Snapchat. Joli saut.
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