Le financement participatif (crowdfunding) bénéficie depuis peu d’une forte attention médiatique. Il faut dire que plusieurs projets ont crevé le plafond, à l’image de la web-série Noob qui a récolté plus de 680 000 euros pour sa trilogie cinématographique alors qu’elle ne demandait au départ que 35 000 euros. À l’étranger, certaines campagnes sont même parvenues à obtenir plusieurs millions de dollars.
Le financement participatif fait appel à la générosité du public. N’importe qui peut soumettre un projet et proposer des « récompenses » en fonction du montant versé. Dans le cadre d’un film, un participant donnant 5 euros pourra par exemple avoir son nom au générique. S’il donne 50 euros, il aura droit au DVD collector. S’il donne 200 euros, il sera invité à l’avant-première. Et ainsi de suite.
L’ombre de la régulation
Ce mécanisme ne se limite pas à la sphère artistique. Il est possible de le mobiliser pour d’autres secteurs, comme celui du high tech pour concevoir un mobile, sortir un jeu vidéo ou développer une fonctionnalité d’un logiciel. Évidemment, toutes les demandes ne sont pas couronnées de succès. En outre, les risques ne disparaissent pas une fois la campagne bouclée : l’échec peut survenir, l’arnaque peut exister.
L’émergence du crowdfunding a en tout cas conduit les responsables politiques, à l’échelle nationale et européenne, à réclamer « une clarification du cadre juridique applicable à la finance participative et du statut fiscal des contributions collectées par les plateformes de crowdfunding » (rapport Lescure). Et la régulation est d’ores et déjà en marche, selon Les Échos.
250 euros maximum par prêt
Dans un document (.pdf) de l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution titré « un nouveau cadre pour faciliter le développement du financement participatif », il est indiqué que « le montant total du crédit et celui prêté par chaque participant […] sont fixés respectivement à 300 000 euros et 250 euros« . Au-delà, il faudra que les plateformes obtiennent un agrément bancaire et se soumettent à un contrôle. Faut-il considérer que le gouvernement handicape le crowdfunding ?
Selon le mode de financement utilisé, le crowdfunding ne sera pas impacté de la même façon. Il existe en effet quatre grandes familles, résumées par Ulule :
- les plateformes de don (« donation-based »),
- le financement sans contreparties financières (« reward-based »),
- le financement avec prise de participation (« equity-based »),
- le prêt participatif (« lending-based »).
Prêt =/= don
La régulation avancée par le gouvernement ne concerne pas les plateformes de dons mais bien celles impliquant un prêt ou une prise de participation. C’est ce que confirment Ulule, un service français spécialisé dans les dons, et Fleur Pellerin, ministre de l’économie numérique, en citant le cas de KissKissBankBank. Idem pour MyMajorCompany. C’est du don ou avec une contrepartie non pécuniaire, donc hors champ des futures modifications réglementaires.
En réalité, le projet de règlementation vise à assouplir la loi actuelle sur les prêts, très restrictive, pour autoriser beaucoup plus de petits prêts par des particuliers.
Comme le faisait remarquer @Erebuss sur Twitter, le cadre actuel ne permet pas de prêter de l’argent avec intérêt à plus de deux personnes à la fois, indépendamment des montants en jeu. La seule manière de dépasser cette limite est d’obtenir un agrément de l’autorité de contrôle. Dans le cas contraire, c’est s’exposer à des poursuites pénales.
250 euros, un plafond trop bas ?
Or, les plateformes de crowdfunding sont utilisées par un nombre croissant de start-ups pour lever des fonds auprès de particuliers, qui prêtent potentiellement à bien plus de deux projets en même temps. De petites sommes, mais réparties entre une multitude de start-up. C’est donc pour légaliser cette pratique que le projet vise à assouplir les conditions des prêts « equity-based » et « lending-based ».
Reste toutefois un point sur lequel les opinions divergent : le plafond de 250 euros par prêt est-il trop bas ? Tout dépend si l’on voit le verre à moitié vide ou à moitié plein. D’aucuns notent que si le seuil est trop bas, il permet au particulier d’agir plutôt que de l’exposer à un risque pénal. D’autres laissent entendre que c’est un coup porté à la « finance parallèle » afin de préserver le monopole bancaire.
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