Hier, nous rapportions que la ministre de la Culture Fleur Pellerin travaillait toujours de concert avec son ancien ministère de Bercy, pour proposer que la France mette en place une taxe sur la bande passante, dont le produit serait reversé au moins pour partie aux producteurs audiovisuels. Le schéma envisagé est conçu sur le papier pour ne toucher que les grandes entreprises du web situées hors de France, ou qui réalisent une optimisation fiscale telle qu'elles ne payent quasiment pas d'impôts en France. La taxe assise sur l'ensemble des flux de données en France serait en effet déductible de l'impôt sur les sociétés, donc en principe indolore pour les entreprises françaises soumises à l'impôt.
Mais ce n'est pas du tout l'avis de l'Association Française des Editeurs de Logiciels et Solutions Internet (AFDEL). "Ce serait une mauvaise nouvelle pour tout le monde", assure à Numerama Loïc Rivière, le délégué général de l'AFDEL. "Tous les acteurs d’Internet mais aussi du Cloud seraient concernés. Les effets de bords seraient les même que pour la dite feu « taxe google »", qui prétendait taxer les revenus publicitaires sur Internet mais ne touchait pas le premier concerné.
"Les start ups du web ne paient par définition peu ou pas d’impôts sur les bénéfices… qu’elles ne font pas, et seraient donc directement affectées par la taxe, à moins qu’on prévoit un crédit d’impôt, ce qu’on imagine assez difficilement", tranche M. Rivière.
Concernant l'impact sur le réseau d'une telle taxe qui frapperait les éditeurs qui utilisent le plus de bande passante pour leurs services, l'AFDEL appelle aussi à la prudence. Elle rappelle que les services de vidéo, par exemple, sont aujourd'hui parmi ceux qui coûtent les plus chers à mettre en place et qui consomment le plus de bande passante, mais ce ne sont pas du tout les plus rentable, loin s'en faut. Les taxer risquerait donc d'atteindre encore plus à un modèle économique déjà très fragile.
PAS PLUS DE TAXE NETFLIX QUE DE TAXE GOOGLE
"En outre, la France deviendrait une zone de transit de données à éviter et les points d’interconnexions pourraient se déplacer", prévient Loïc Rivière. "C’est en fait un projet pensé à l’origine pour financer les infrastructures télécoms qui doivent procéder à de lourds investissements pour suivre l‘augmentation du trafic ! On ne voit pas bien le lien avec l’exception culturelle…".
Enfin, le délégué général de l'AFDEL met en garde contre tout discours qui tendrait à prétendre que la taxe serait indolore pour les internautes, qui ne la paieraient pas. "Les taxes sont toujours payées par le consommateur, il suffit de regarder le cas de la Copie privée", rappelle Loïc Rivière.
Cependant "le consommateur n’a pas vraiment de souci à se faire car ce projet de taxe est en contradiction avec les jurisprudences françaises et européennes", assure-t-il. "On ne peut pas créer de taxe sur mesure pour viser un acteur du marché ou un business model. Gageons donc qu’il n’y aura pas plus de taxe Netflix qu’il n’y a eu de taxe Google et que les usages du numériques continueront de se déployer !"
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Abonnez-vous à Numerama sur Google News pour ne manquer aucune info !