L’histoire a été largement partagée sur les réseaux sociaux depuis sa publication sur Medium le dimanche 4 novembre. Yassine M. raconte avoir été arrêté puis placé en garde à vue… à cause de sa startup. Une histoire que personne ne semble en mesure de confirmer, même pas les autorités, contactées par Numerama. Personne, sauf Yassine : « C’est une véritable opération marketing pour faire le buzz, pour faire connaître ma startup », nous affirme formellement l’intéressé.
Retour sur une histoire invraisemblable qui a agité le microcosme business français.
Une conversation lunaire dans un bus parisien
Voici ce qu’il narre dans son billet de blog. Toute l’histoire commence à Paris. Nous sommes le 18 octobre, et « après une longue journée de travail », Yassine M., fondateur de la startup Turnadon, décide de rentrer chez lui en bus. Sur son trajet, il reçoit un appel de Leila, sa future stagiaire qui « a beaucoup d’idées à la seconde et n’hésite pas à [lui] démontrer sa motivation à rejoindre les équipes en listant toute une série d’idées ».
Dans cet échange qui porte sur les projets de « Leila » au sein de l’entreprise, Yassine M. (qui précise porter une barbe dans son récit) utilise de manière quasi systématique des termes appartenant au champ lexical religieux, puis à celui du terrorisme. Il dira par exemple « convertir » des personnes (un terme qui existe aussi dans le marketing), « il faut frapper fort, il faut être radical », « c’est important qu’on target une cible bien précise », avant de conclure sur « tu pourrais re-regarder les vidéos d’Oussama, lui il a tout compris.»
Selon l’auteur du post Medium, les autres passagers du bus auraient commencé à se taire, écoutant du coin de l’oreille cette conversation qui, en ne gardant que ses paroles à lui, aurait pu être mal interprétée.
Quatre heures en garde à vue… et des doutes
Il raconte que seulement 4 arrêts plus tard, le bus aurait été arrêté par la police, qu’il aurait été arrêté, et qu’on l’aurait conduit au commissariat. Les policiers l’auraient alors interrogé sur son emploi du temps, le nom de son « organisation » prétendument terroriste, et la mention d’Oussama, qu’ils associent à Oussama Ben Laden alors que Yassine M. parlait d’Oussama Ammar, cofondateur de TheFamily, une entreprise française dédiée à la promotion de startups…
L’agent de la DGSE lui aurait posé plus de questions sur sa startup
Un agent de la DGSE (en France, c’est pourtant la DGSI qui s’occupe des menaces terroristes sur le territoire) serait intervenu. L’entrepreneur lui aurait alors pitché sa startup, avant de repartir sans encombre.
Dans les commentaires du post Medium et sur les réseaux sociaux, des doutes ont rapidement été émis sur la véracité de l’histoire racontée. Celle-ci semblait en effet presque trop « grosse » (et trop écrite) pour être vraie. Par exemple, lorsqu’il est face à la DGSE/DGSI, Yassine M. aurait pris le temps de raconter : « Nos annonceurs ont besoin de temps de parole privilégié afin d’optimiser la mémorisation et leurs retours. Nous réduisons ainsi le nombre d’annonceurs et nous intéressons à des lieux non saturés de messages publicitaires. 70% de notre réseau est sur des points d’arrêts, comme de belles terrasses de bars/restaurants par exemple. Nous surprenons dans des lieux premiums. Nous enrichissons notre plateforme de Data afin de proposer des publicités de plus en plus ciblées et personnalisables en fonction de différents critères. Nous souhaitons être présents dans la ville, mais avec la souplesse du Web ! »
… Et l’agent lui aurait posé plus de questions sur sa startup, soudainement plus intéressé par son business plan que ses liens avec le terrorisme.
Une histoire abracadabrante que personne ne prend au sérieux
Publié sur Facebook, son message a été ponctué de quelques commentaires d’autres entrepreneurs de startups qui validaient son histoire. L’un d’entre eux, joint par Numerama, nous explique que l’histoire était selon lui vraisemblable… puisque Yassine M. l’aurait « racontée à un associé lors d’une soirée Halloween », où étaient présents d’autres startupeurs.
Oussama Ammar, lui, ne semblait pas avoir été mis au courant de l’affaire, où un parallèle douteux est fait à partir de son prénom, avant notre appel. Il nous a assuré ne pas avoir été contacté par la DGSE, avant d’ajouter, par mail : « Même si je ne connais pas personnellement l’auteur de cet article, je suis heureux de l’avoir aidé à créer son entreprise à travers mes vidéos, et ce, tout en me prénommant Oussama. » De son côté, la préfecture de police a assuré à Numerama qu’aucun événement de la sorte n’avait été remonté jusqu’à eux, bien qu’ils aient été mis au courant de l’existence du post Medium.
Des conclusions évidentes : rattrapé par la réalité de son buzz, Yassine M. nous a confirmé qu’il s’agissait d’une opération de communication. L’histoire nous dira si il aura été bénéfique pour sa startup, ou de trop mauvais goût pour ses clients éventuels…
L’article a été mis à jour avec les déclarations de Yassine M.
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