Apple peut-il à la fois tenir son discours en faveur de la vie privée tout en gardant Google comme moteur de recherche par défaut, alors que son modèle économique est basé sur la publicité ciblée, et donc sur l’exploitation des données personnelles des internautes ?
Oui, répond Tim Cook. Dans un entretien avec Axios diffusé le 18 novembre, le patron d’Apple a avancé ses arguments.
« Regardez ce que nous avons fait avec les réglages que nous avons intégrés. Nous avons la navigation privée pour le web. Nous avons un système intelligent de prévention des outils de suivi pistant les internautes », liste celui qui a repris les rênes de l’entreprise en 2011. Il y fait référence à l’Intelligent Tracking Prevention, un mécanisme déployé sur le navigateur Safari dans macOS Sierra et iOS 11.
« Ce que nous avons essayé de faire, c’est de trouver des moyens d’aider nos utilisateurs tout au long de la journée », poursuit Tim Cook. « Ce n’est pas parfait. Je serais le premier à la reconnaître. Mais ça aide beaucoup », juge-t-il. Les semaines suivant l’adoption d’iOS 11 sur les terminaux mobiles d’Apple et l’adoption de macOS Sierra, l‘effet sur les annonceurs a été remarqué.
Plus généralement, Tim Cook considère que la qualité du moteur de recherche de Google est bien supérieure à ce que peut proposer la concurrence — essentiellement Bing aux États-Unis — et que c’est bien normal de proposer le meilleur à la clientèle Apple. « Je pense que leur moteur de recherche est le meilleur », avance-t-il, sans autre explication pour défendre cet argument.
Google est-il le meilleur moteur de recherche du marché ? Peut-être. En tout cas, il est celui qui peut le plus allonger la monnaie pour s’imposer comme l’outil par défaut dans l’écosystème Apple. Car cette place vaut cher. Le montant que dépense chaque année Google pour avoir ce statut privilégié n’est pas su avec certitude, mais il s’élève très probablement en milliards de dollars.
Un ticket toujours plus cher
Plusieurs montants ont circulé ces dernières années, montrant au passage que le ticket est de plus en plus coûteux pour Google : en 2010, il était question d’une note à 100 millions de dollars. En 2013, la somme d’un milliard de dollars a été avancée. Un analyste de Bernstein a cité le chiffre de trois milliards de dollars en 2017. Et en 2017, la banque Goldman Sachs a fait une estimation à… neuf milliards de dollars.
Ce montant, probablement basé sur le nombre de requêtes traitées, dépend aussi de la part de marché qu’a Apple dans le fixe et le mobile, avec Safari. Selon IDC, iOS pèse à peu plus de 15 % du marché des smartphones en 2018. Cela peut sembler modeste, car cette statistique reflète assez mal le fait que ce secteur brasse des dizaines, des millions de smartphones dans le monde.
Reste une dernière interrogation : ces montants, s’ils sont exacts, peuvent-ils être supportés longtemps par Google ? Si cela représente de fait énormément d’argent, il faut replacer cette somme dans le chiffre d’affaires global du groupe, qui a dépassé la barre des 100 milliards de dollars en 2017. Dès lors, ces 9 milliards de dollars ne représentent qu’une fraction (10 % environ) du total.
Or, l’investissement d’une fraction de son chiffre d’affaires global dans un domaine — la recherche et donc par ricochet la publicité — qui génère l’essentiel des revenus du groupe (88 % du chiffre d’affaires d’Alphabet, la maison-mère de Google, provient des recettes publicitaires) est tout sauf absurde. C’est un investissement pour la croissance du groupe, et Google ne peut pas se permettre de lever le pied.
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