Plusieurs milliers de bureaux de tabac vendront dès 2019 des coupons permettant de créditer des portefeuilles électroniques avec des bitcoins ou de l’ether. La Banque de France fait néanmoins savoir qu’aucune convention n’a été signée en ce sens.

Le bitcoin et l’ether vont se matérialiser dans le monde physique. D’après Europe 1, qui a malheureusement entouré l’information d’un bon nombre d’imprécisions et d’intox, les bureaux de tabac vendront dès le 1er janvier 2019 des « coupons » de différents montants (50, 100, 250 euros), sur lesquels un code sera inscrit. Celui-ci servira à échanger la valeur du ticket contre des unités de la cryptomonnaie de son choix.

La bascule est d’ampleur : entre 3 000 et 4 000 établissements (sur près de 25 000) doivent être équipés à la nouvelle année. Les terminaux de paiement seront fournis par la société Bimedia, fait savoir Sylvain Heubert, le directeur général de la Confédération nationale des buralistes, interrogé par BFM TV. « Le réseau des buralistes va être le premier réseau physique à vendre des cryptomonnaies », assure-t-il.

Contactée, la Confédération nationale des buralistes n’a pas pu dans l’immédiat donner suite à nos demandes d’explication. Pour sa part, la Banque de France a publié le 21 novembre un communiqué dans lequel elle explique ne pas être impliquée : « aucune convention n’a été signée afin de permettre la vente de bitcoin dans les bureaux de tabac. Aucun accord n’est par ailleurs discuté ni envisagé sur le sujet ».

Elle ajoute : « La Banque de France rappelle qu’elle a émis à plusieurs reprises des mises en garde sur l’usage des crypto-actifs ; ces mises en garde demeurent d’actualité. Ce sont des actifs purement « spéculatifs » et ne sont pas des monnaies. Ceux qui investissent dans le bitcoin comme dans les autres crypto-actifs le font entièrement à leurs risques et périls ». Il n’y aura donc pas de filet de sécurité.

 

Le site KeplerK. // Source : KeplerK

Le site KeplerK.

Source : KeplerK

Concernant le code sur le ticket, il devra être utilisé sur KeplerK, une plateforme de vente et d’achat de cryptoactifs. Un portefeuille électronique sera ensuite crédité en unités de la cryptomonnaie choisie, en fonction du cours par rapport à l’euro, au moment de l’achat dans le bureau de tabac. L’intéressé aura alors un mois entier pour charger son compte sur KeplerK.

Naturellement, le montant obtenu sera très dépendant des fluctuations de la valeur de la devise électronique, celle-ci étant très volatile (et dans une dynamique très négative).

Chute du bitcoin le 19 novembre (en euros) // Source : Trade Kraken

Chute du bitcoin le 19 novembre (en euros)

Source : Trade Kraken

Le Bitcoin et l’Ether proposés

Il existe d’ailleurs un partenariat entre Bimedia et KeplerK, précise notre confrère. En outre, des initiatives individuelles pouvaient déjà s’observer par le passé chez certains bureaux de tabac, avec la vente des cryptomonnaies. En ce qui concerne cet accord, le Bitcoin sera proposé au public, tout comme l’Ethereum, l’autre grande devise du secteur.

Mais contrairement à ce qu’affirme Europe 1, cette initiative n’a pas fait l’objet d’un accord particulier de la part de la Banque de France. Le journaliste Grégory Raymond, qui connaît bien le domaine des cryptomonnaies, a également corrigé une imprécision charriée par Europe 1 selon laquelle « le Bitcoin deviendra à compter de mars 2019 un site de paiement à part entière, comme PayPal ».

En fait, un module spécifique, développé par PrestaShop, sera utilisé par KeplerK pour que la clientèle puisse payer en Bitcoins. 270 000 marchants l’utilisent.

Si les buralistes se félicitent d’être le futur réseau de change Euro-Cryptoactifs le plus vaste de France, ils ne seront pas les premiers. C’est Coinhouse (ex-Maison du Bitcoin) qui a ouvert la voie, à Paris. Depuis, des initiatives plus ou moins similaires ont vu le jour à Montpellier (Group BTC France), Toulouse (MineOnCloud), et Bois-Colombes (BitAccess), avec l’emploi de distributeurs de cryptomonnaie.

Une pièce frappée du logo du Bitcoin. // Source : Marco Verch

Une pièce frappée du logo du Bitcoin.

Source : Marco Verch

Vérifications à prévoir

Les comptoirs de change localisés en France doivent en principe se soumettre à des mesures spécifiques pour vérifier l’identité de leur clientèle (c’est ce qu’on appelle la démarche « know your customer », ou KYC). C’est ce que fait Coinhouse en demandant une pièce d’identité en cours de validité, d’un RIB au nom de l’acheteur et d’un portefeuille électronique, à des fins de traçabilité.

« Notre activité de change a été visée par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et nous appliquons ainsi les procédures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme au premier euro », explique Coinhouse. Méfiante à l’égard des cryptomonnaies, dont la valeur est très aléatoire, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dépend de la Banque de France.

« Connaissez votre client »

Les buralistes seront concernés par le processus du « know your customer ». Grégory Raymond, dans un article sur Capital, explique que « dès le premier rechargement, il faudra fournir quelques renseignements personnels en communiquant sa carte d’identité, un justificatif de domicile et un selfie » (ou si l’achat est supérieur à 250 euros). Il est prévu d’interdire la vente de ces cryptoactifs aux mineurs.

Reste une question : quel intérêt ?

Pour les buralistes, il est d’ordre financier: sur les 7 % de commission que prend KeplerK au moment de l’achat, une partie est reversée au bureau de tabac. Pour le grand public, c’est plus discutable, puisque ces opérations peuvent se faire directement en ligne, sans sortir de chez soi. Mais peut-être que la matérialisation temporaire du change, via le coupon, permettra de dissiper certaines craintes.

(mise à jour avec le communiqué de la Banque de France)

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