Pour 5 euros par mois, vous pouvez avoir accès à une cinquantaine de jeux originaux, léchés et bien construits sur Apple Arcade, le nouveau service lancé par la marque à la pomme en France le 19 septembre… Ou bien vous pouvez avoir accès à un pass unique sur Mario Kart Tour, qui vous permettra de rouler un peu plus vite et d’avoir quelques badges dorés.
À première vue, et comme diraient certains, il semble évident que les calculs ne sont pas bons. Quand on s’y penche de plus près, il s’agit même d’une preuve que la stratégie mobile de Nintendo frôle l’anachronisme.
Un pass cher qui n’apporte pas grand chose
Le 25 septembre 2019, l’entreprise japonaise a sorti Mario Kart Tour, son adaptation très attendue de son jeu de course. Il est techniquement gratuit : c’est un modèle free-to-play, ce qui signifie que vous n’avez pas besoin de payer pour jouer. En revanche, il est rempli de microtransactions qui ont pour but de vous faire débourser beaucoup d’argent. La stratégie semble par ailleurs fonctionner, puisque Nintendo aurait récolté plus d’un million de dollars en 24 heures.
Il existe plusieurs manières de dépenser de l’argent dans le jeu, notamment en achetant des rubis, une monnaie virtuelle, qui permet d’obtenir des pièces d’or, autorisent l’achat de personnages ou l’activation de loot boxes (coffres à butins aléatoires). Mais Nintendo a aussi lancé un curieux « pass » mensuel, à 5,49 euros, qui laisse dubitatif lorsque l’on sait ce que proposent ses concurrents. Ce pass mensuel permet :
- D’avoir la possibilité de gagner éventuellement quelques objets supplémentaires,
- De gagner des badges dorés (que vous pouvez arborer fièrement devant… les bots contre lesquels vous jouez),
- De débloquer la vitesse 200cc, qui permet aux karts d’aller plus vite.
Les deux premiers sont assez dérisoires. Reste le mode 200cc, censé justifier quasiment à lui seul ce prix de 5,49 euros par mois (avec 2 semaines d’essai gratuit pour celles et ceux qui n’avaient pas encore de compte Nintendo, ce qui restreint déjà la clientèle concernée). Or dans l’écosystème des jeux mobiles, ce montant est aberrant.
Il est impossible de ne pas comparer ce tarif à celui d’Apple Arcade, le service de jeux vidéo à la demande par abonnement qui a été lancé par la marque à la pomme sur iOS le 19 septembre 2019 au même moment dans 150 pays. L’offre permet, pour 4,99 euros par mois, d’avoir accès à plus de 50 jeux actuellement (et 100 jeux d’ici fin 2019, promet Apple). Une fois téléchargés, vous avez accès à ces jeux exclusifs de manière illimitée — en plus d’un mois gratuit d’essai.
À coté, le pass Mario Kart Tour fait pâle figure : il est plus cher et ne permet de jouer qu’à un seul jeu, dont la majorité des contenus sont accessibles gratuitement, de surcroit. Un bon jeu, certes — si vous aimez l’aspect répétitif des courses à enchaîner — mais un jeu unique, qui a de surcroit été conçu comme une impressionnante machine à cash.
Ce n’est pas la première fois que Nintendo demande à des utilisateurs de payer trop pour un contenu : en 2016, la firme avait lancé son premier jeu mobile, Super Mario Run, pour la modique somme de 9,99 euros (on pouvait télécharger l’app sans payer, et jouer à un seul niveau gratuitement). Et les statistiques sont formelles : pour 90 millions de téléchargements, seuls 3,33 % ont finalement acheté le jeu, montrant clairement les limites d’une telle opération. Nintendo a par la suite admis que les ventes étaient décevantes, et que le prix affiché était trop élevé.
À titre de comparaison également, le leader Pokémon Go contient lui aussi des microtransactions (comptez 0,99€ les 100 pièces d’or), mais beaucoup moins présentes (vous pouvez payer pour avoir plus de Pokéball ou des Super Incubateurs, par exemple) et, surtout, pas d’abonnement mensuel inutile. Visiblement, cette approche fonctionne : en janvier 2019, soit 3 ans après la sortie du jeu, le studio Niantic a encore engrangé 68 millions d’euros.
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