Les artistes et les managers prennent exemple sur les maisons de disques. Dans cette période de crise de l’industrie musicale, tout est bon à prendre ou à demander, même ce qui n’a pas lieu de l’être. Les managers de plus de 400 artistes-interprètes en Grande-Bretagne ont ainsi annoncé cette semaine la création de la Resale Rights Society, un collectif qui vise à légaliser outre-Manche le marché noir des billets de concerts pour tous les vendeurs qui acceptent de reverser une partie du prix des billets d’occasion sous la forme d’une taxe reversée aux artistes.

Officiellement, il s’agit de fournir aux consommateurs un environnement sécurisé qui leur garantit que le vendeur des billets est bien autorisé à revendre des « billets d’occasion » sur le marché. Mais l’initiative vise surtout bien sûr à capter une part importante des bénéfices réalisés grâce à l’inflation du prix des billets de concerts les plus recherchés. « Il est inacceptable que pas un seul centime des 200 millions de livres sterlings estimés dans les transactions générées par les revente de billets de concerts en Grande-Bretagne soit reversé à ceux qui investissent dans l’industrie du concert« , explique Marc Marot, le manager de Yussuf Islam et Paul Oakfenfold, ancien directeur du label Island Records et président de la Resale Rights Society.

Ce droit de revente ressemble fort au droit de suite qui existe pour la revente des tableaux, et qui permet à l’auteur ou à ses héritiers de bénéficier d’un pourcentage sur le prix de la revente. C’est le seul et unique cas dans lequel l’artiste bénéficie d’un droit sur les ventes successives du matériel sur lequel est fixé son œuvre. Si ce droit de suite existe, c’est par pur pragmatisme économique. Contrairement à une œuvre littéraire ou musicale, un tableau n’est par nature fixé que sur un seul support, et ne génère donc de l’argent qu’à la vente et aux reventes de ce support. Et sa valeur, généralement, augmente avec le temps et la notoriété du peintre. Or en matière de musique et de concerts, l’artiste qui vend ses places de concerts a déjà établi sa notoriété, et dispose de plusieurs sources de revenus. Rien ne justifie donc qu’il touche sur la revente des places de concerts. Si ces places n’ont pas été vendues assez cher, c’est une erreur de gestion comme en font tous les professionnels dans tous les corps de métier. Au nom de quoi les artistes bénéficieraient-ils d’une garantie supplémentaire contre leurs erreurs de gestion ?

Plus largement, la reconnaissance d’un tel droit participerait à l’idée d’une disparition progressive du droit de vendre d’occasion les « objets culturels » achetés par le consommateur. On le voit déjà avec les morceaux de musique et films vendus sous DRM, qu’il est impossible de revendre, mais aussi avec les jeux vidéo « Games for Windows » dont la clé unique empêche concrètement la revente à un tiers.

En France, la revente des billets de spectacles n’est pas interdit tant que le prix de revente ne dépasse pas le prix de la valeur faciale.

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