La Société des Producteurs de Phonogrammes en France (SPPF) ne veut plus subir le rythme imposé par les entrepreneurs. Elle a tapé du poing la table lundi, en menaçant publiquement l’ensemble des opérateurs qui exploiteraient le catalogue des labels indépendants sans avoir obtenu d’autorisation préalable. Beaucoup de sites qui suivent le modèle de Deezer ou de Radioblog se montent en effet sans avoir négocié le moindre accord avec les ayants droit, avec au mieux l’intention de négocier les droits plus tard, s’ils deviennent suffisamment gros pour arriver « dans le radar » des maisons de disques et soulever suffisamment de revenus.
Mais lundi, la SPPF a publié une mise en garde générale contre « les trop nombreux services de musique en ligne qui bafouent quotidiennement les droits des producteurs de phonogrammes ou de vidéomusiques« . « C’est le cas pour de nombreux services de webcasting, de services basés sur le stream à la demande ou encore pour les sites communautaires. Sans parler des sites français qui délocalisent leurs activités à l’étranger pour éluder toute négociation avec les détenteurs de contenus« , explique la société de gestion collective présidée par Jérôme Roger.
Elle rappelle qu’elle « a la capacité d’agir dans l’intérêt de ses membres pour faire respecter leurs droits les plus élementaires », et souligne à nouveau qu’elle a porté contre contre X à raison de la mise à disposition illicite de phonogrammes par Radioblog, ce que le site conteste.
Vers la tolérance zéro, c’est-à-dire l’intolérance
« Si certaines situations ont pu être tolérées dans un passé proche, elles ne le seront plus à l’avenir. Dorénavant, la SPPF aura une attitude très ferme à l’égard des sites ou des opérateurs utilisant des phonogrammes ou des vidéomusiques en infraction avec les droits de producteurs de musique et elle agira promptement à leur encontre dès lors qu’elle aura constaté des actes de contrefaçon« , prévient la SPPF. Elle précise qu’il s’agit aussi d’une attitude qu’elle se doit d’adopter par respect des partenaires qui payent effectivement leurs licences à la SPPF, et qui n’apprécient pas de voir se créer des concurrents dans l’illégalité.
Reste que si le message est compréhensible et légitime sur le fond, il hypothèque encore davantage les chances de voir arriver en France des services véritablement innovants qui créent de la valeur ajoutée pour la musique. Beaucoup de créateurs de services n’ont pas les moyens de payer des licences aux différents producteurs, et cherchent avant tout à valider un modèle technique avant de chercher un modèle économique. Exiger de ces créateurs de services qu’ils payent dès le premier jour est légalement juste, mais économiquement dangereux.
L’intolérance de la SPPF tuera dans l’oeuf de nombreux projets qui, soit ne verront jamais le jour par prudence des entrepreneurs, soit seront pensés très exactement dans le but de contourner les règles de la SPPF et de n’avoir aucun compte à rendre. C’est avec le même genre d’intolérance envers les éditeurs de logiciels de P2P commerciaux que les maisons de disques ont précipité l’avènement de logiciels de P2P open-source avec lesquels il est impossible de négocier.
Il n’est pas du tout sûr qu’en bout de course, cette attitude d’intolérance soit plus efficace économiquement que le laissez-faire. Mais la SPPF a-t-elle véritablement le choix ? Où qu’elle regarde, l’industrie du disque aperçoit toujours un précipice vers lequel elle se dirige inoxérablement.
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