Une étoile sur cinq. C’est désormais l’appréciation moyenne laissée par les internautes sur Robinhood. Robinhood, c’est cette application spécialisée dans le trading qui est au cœur de l’affaire qui a vu s’affronter des fonds spéculatifs de Wall Street (les « hedge funds ») à une communauté Reddit sur le cours de l’action de GameStop, une chaîne de magasins de jeux vidéo aux USA, semblable à Micromania en France.
Pourquoi une note si basse ? Car il est reproché à l’app d’avoir suspendu sans raison valable les ordres envoyés par des internautes de cette communauté Reddit. Ils étaient visiblement décidés à sauver GameStop, en cherchant à faire remonter le niveau de son action, ou bien à se payer quelques hedge funds, qui ont parié contre GameStop, en misant sur la baisse prochaine de son cours.
La probité de Robinhood mise en cause
En effet, le modèle économique de Robinhood implique un contrat passé avec Citadel, un fonds d’investissement propriétaire d’un autre hedge funds, Melvin Capital, qui est l’un des acteurs de Wall Street qui a le plus perdu d’argent lorsque la communauté Reddit s’est mobilisée. Citadel a certes renfloué Melvin, mais il aurait aussi fait pression sur Robinhood pour le forcer à couper les ordres.
Ces pressions, qui restent à démontrer, ne seraient pas étonnantes. La somme injectée par Citadel dans Melvin s’élève à 2,75 milliards de dollars — ce qui est énorme quand on pense que c’est une mobilisation d’internautes. Le fonds d’investissement aurait naturellement des raisons d’exiger que cesse cet assaut contre son hedge fund, qui a perdu plus de 53 % de ses investissements en janvier– une enquête émerge d’ailleurs aux États-Unis pour en avoir le cœur net.
Cela étant, le fondateur de Robinhood s’est fendu d’une explication pour souligner que sa société avait des raisons objectives et légitimes de calmer le jeu, car ces volumes d’ordres étaient anormaux, outre les obligations réglementaires qu’il lui faut respecter. Par ailleurs, la séquence était également périlleuse sur un plan financier : c’est pour cela qu’il lui a fallu lever un milliard de dollars en urgence, puis encore 2,4 milliards de dollars pour pouvoir absorber ce boom des ordres.
Même si l’explication de Robinhood tient la route, c’est la suspicion d’une filouterie entre Citadel et l’application de trading qui est dans la majorité des esprits. Dès qu’il a été vu que les ordres ne pouvaient plus être passés pour l’action de GameStop (ils ont toutefois pu être rétablis par la suite), de nombreux internautes se sont tournés vers la boutique Google Play pour laisser exploser leur mécontentement.
Robinhood se fait rosser sur Google Play
Fin janvier, on apprenait que Google était intervenu pour retirer pas moins de 100 000 notes et opinions (très) négatives sur Robinhood. À ce moment-là, l’application mobile bénéficiait encore d’une note très bonne, de quatre étoiles sur cinq, moyenne des 180 000 avis laissés sur le magasin d’applications. Mais depuis, Google a réautorisé les internautes à critiquer le logiciel.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la réputation de Robinhood est désormais à terre. Plus de 320 000 notes figurent maintenant sur sa page Google Play, avec une moyenne d’une étoile sur cinq. C’est la note la plus basse qu’il est possible d’avoir, puisqu’il n’est pas possible de n’attribuer aucune étoile. Et ce qui est remarquable, c’est que ce sont de nouveaux commentaires, et non ceux que Google a précédemment écartés.
Google s’est adressé à The Verge pour donner quelques explications sur la manière dont il a géré la vague de critiques visant Robinhood sur sa plateforme. L’entreprise explique qu’il ne s’agissait pas de protéger spécialement des mauvaises notes, mais d’éviter ce qui a pu s’apparenter à une manipulation de la notoriété de l’application, exactement comme des dispositions existent pour éviter la manipulation des cours boursiers.
« Pour être clair, cela n’est pas fait pour protéger une application des critiques négatives, mais pour aider à protéger les développeurs d’applications contre des choses telles que les bombardements de critiques coordonnées et pour protéger nos systèmes contre toute manipulation artificielle », écrit Google. Or à ses yeux, la première vague des commentaires relevait visiblement d’une opération coordonnée.
«Les systèmes d’évaluation des applications de Google Play sont conçus pour fournir une vision authentique et fiable de l’expérience utilisateur d’une application, et nous prenons des mesures contre toute activité inauthentique ou coordonnée visant à augmenter ou à diminuer artificiellement le score global d’une application », poursuit la firme de Mountain View, qui semble désormais croire à un retour à la normale.
Du côté des internautes, la colère ne paraît pas dissipée. Robinhood, qui est très populaire chez les jeunes Américains, risque de payer longtemps son intervention dans l’activité boursière de sa communauté : le fait que la page Google Play de l’application reçoive encore des opinions assassines — dont certaines rappellent malicieusement la promesse de laisser les internautes faire ce qu’ils veulent — en est la preuve.
Mais dans toute cette affaire, il n’y a pas que Citadel, Robinhood, Melvin Capital ou bien les internautes de Reddit. Il y a aussi GameStop. Et le retour à la réalité semble d’ores et déjà amorcé. Après avoir frôlé les 470 dollars, l’action, qui barbotait jusqu’alors aux alentours de 5, 10 et 20 dollars, est en train de redescendre. Elle est déjà en train de repasser sous la barre des 100 dollars. Reste à savoir jusqu’où.
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