La Commission européenne lance une enquête contre Facebook et Google pour faire toute la lumière sur leur accord dans la publicité. Des investigations identiques existent aux USA et au Royaume-Uni.

Face à Jedi Blue, Bruxelles contre-attaque. La Commission européenne annonce ce vendredi 11 mars 2022 l’ouverture d’une enquête sur Google et Meta (ex-Facebook) en raison de la possible existence d’un accord secret entre les deux géants du net dans la publicité en ligne. Ce deal confidentiel entre les deux groupes pourrait constituer une infraction des règles sur la concurrence.

Ce nom, qui évoque immanquablement Star Wars, a émergé l’automne dernier, quand il a été rapporté une plainte signée par les procureurs de dix-sept États américains. Mais en réalité, les plaignants avaient déjà Google et Facebook dans le viseur au moins depuis 2020, car la procédure lancée en octobre 2021 faisait suite à une précédente action datée de décembre 2020.

Une alliance pour ne pas avoir Meta en rival direct dans la publicité

Essentiellement, la critique portée contre les deux entreprises américaines se situe sur leur tactique pour « tuer » le marché du « header bidding » — une formule qui désigne les enchères d’en-tête, une technique dont se servent les éditeurs de contenus pour intégrer dans les pages web du code permettant de proposer les espaces publicitaires.

« Cette méthode permet à l’éditeur d’organiser une mise en concurrence des différents réseaux publicitaires lors de la vente de son inventaire et donc de maximiser ses revenus », détaille la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). Mais encore faut-il que cette mise en concurrence soit effective, pour pouvoir faire émerger l’offre la plus attrayante.

Et c’est ce que veut vérifier la Commission européenne. « Si notre enquête le confirme, cela restreindrait et fausserait la concurrence sur le marché déjà concentré des technologies publicitaires, au détriment de technologies de diffusion d’annonces publicitaires concurrentes, des éditeurs et, en fin de compte, des consommateurs », commente la Commission.

Ce pacte secret est plutôt ancien, puisque sa mise en place est datée à 2018. Il est dit que c’est à l’initiative de Google que cet accord a émergé, car le géant du net voyait d’un mauvais œil, dès 2016 et 2017, l’affaiblissement de ses positions sur le marché de la publicité en ligne — qui est absolument stratégique, car c’est de là que vient la quasi-totalité de ses revenus.

Le nouveau panneau à l'entrée de Meta (anciennement Facebook) // Source : Photo presse Facebook
Facebook, devenu Meta, est pointé du doigt avec Google pour un accord secret dans publicité. // Source : Photo presse Facebook

Plutôt que d’aller à la confrontation avec Facebook, c’est donc la négociation qui a été privilégiée, ce qui a provoqué par ricochet une situation anticoncurrentielle. C’est ce que dénonce d’ailleurs la plainte américaine : « Google a illégalement évincé ses concurrents du marché du header bidding en convainquant son principal rival tech, Facebook, de cesser de soutenir cette technologie. »

Bruxelles décrit le partenariat entre les deux sociétés ainsi : Google fournit des services de technologie publicitaire qui jouent un rôle d’intermédiaire entre les annonceurs et les éditeurs. Cela se fait par la vente aux enchères en temps réel d’espaces d’affichage publicitaire sur des sites ou des applications mobiles, notamment au travers d’un programme dédié.

Quant à Meta, il fournit des services d’affichage publicitaire en ligne et, par l’intermédiaire de son « Meta Audience Network », participe à des enchères pour des espaces publicitaires d’éditeurs tiers en utilisant les services de technologie publicitaire de Google — à travers le fameux programme dédié, qui s’appelle l’Open Bidding.

Google conteste fortement la lecture qu’ont les régulateurs américain, européen et même britannique (l’autorité de la concurrence locale a elle aussi lancé une enquête sur Jedi Blue) de la situation. L’entreprise américaine ne conteste pas l’existence de l’accord en tant que tel, mais il est d’après elle là pour « favoriser la concurrence et [est] publiquement documenté. »

À travers Jedi Blue, Facebook peut « participer à notre programme Open Bidding, avec des dizaines d’autres entreprises. La participation de Facebook n’est pas exclusive et ils ne bénéficient d’aucun avantage qui les aiderait à gagner des enchères ». En fait, la présence du site communautaire aurait même des vertus, en générant plus de revenus au profit des éditeurs.

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