À la fin du mois d’avril 2024, la chaîne américaine CNN obtenait, en exclusivité, une interview avec l’un des fugitifs les plus recherchés au monde. Vitel’homme Innocent, un chef de gang haïtien figurant sur la liste des « 10 most wanted » du FBI, avait décidé d’accorder au journaliste de CNN un entretien, directement chez lui, à Haïti.
Cet échange avec la presse pourrait bien l’avoir mené à sa perte. Benjamin Strick, un expert en enquête en source ouverte (OSINT) et ancien journaliste d’investigation, a annoncé le 26 mai 2024 sur X (ex-Twitter) avoir trouvé l’adresse de Vitel’homme — qu’il a révélée en diffusant ses coordonnées. L’expert explique avoir réussi cette prouesse en se basant sur les images diffusées par CNN (on voit la maison du chef de gang), et grâce à des méthodes d’OSINT. Cette technique mobilise des sources d’information publiques, comme Google Maps, et des métadonnées.
De l’OSINT pour retrouver la trace d’un chef de gang
Comment Benjamin Strick s’y est-il pris pour parvenir à trouver l’adresse ? D’après ses explications sur X, rien de plus simple : il s’est servi des images de l’interview, disponible gratuitement sur YouTube. Il s’est ensuite fondé sur des clichés très précis et sur des détails liés au paysage.
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« La première géolocalisation, la plus facile grâce à la majestueuse chaîne de montagnes qui entoure la capitale d’Haïti, Port-au-Prince, se situe à 01:04 de la vidéo. Nous voyons un grand mur, le toit d’une grande usine, un virage sur la route et une belle chaîne de montagnes », indique-t-il.
Une fois ce premier repère géographique établi, Benjamin Strick a continué de faire la même chose avec d’autres images issues de la vidéo de CNN. Il s’est notamment appuyé sur des bizarreries architecturales, telles qu’un pilier à moitié construit et un mur en partie en ruine, ou bien des gravats en bordure de route.
Enfin, quelques images prises par CNN sur le lieu de l’interview montrent une vaste maison, entourée de hauts murs et profitant même d’un jardin. Il n’en fallait pas plus pour confirmer l’adresse de la maison, selon Benjamin Strick. « Les principaux indices étaient des caractéristiques significatives, telles que le toit en double triangle vu de côté, l’entrée au bout de la rue et la construction à côté », raconte-t-il.
Le FBI connaissait-il l’adresse ?
L’adresse de l’une des personnes les plus recherchées au monde étant publique, le FBI a-t-il agi ? Pour l’instant, la situation reste floue, mais il n’y a pas eu de réaction officielle de l’agence américaine sur une arrestation. Le FBI n’a pas non plus commenté le travail d’OSINT de Benjamin Strick.
Surtout, comme Benjamin Strick le précise, il est possible que Vitel’homme soit déjà loin : « Je l’ai fait parce qu’il est utile de savoir où se trouve un chef de gang responsable de violences horribles, même s’il n’est plus là après la visite de CNN. » En outre, si le chercheur a réussi, tout seul, à déterminer l’emplacement de la maison du chef de gang, il est probable que le FBI l’ait également trouvé — l’agence possédait peut-être aussi cette information. Vitel’homme semble pourtant être toujours dans la nature. Si son arrestation a eu lieu, elle n’a pas été ébruitée, ce qui serait étrange.
Cette histoire reste un rappel important de la puissance de l’OSINT. On le voit à diverses occasions, que ce soit la guerre entre l’Ukraine et la Russie, ou à d’autres occasions dans l’actualité. Il suffit de quelques secondes de films, ou de quelques clichées pour réussir à géolocaliser quelqu’un — et cela n’est pas près de changer.
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